17 avril 2013

L’ambition de la pensée énergéticienne


Si je m’attarde longuement sur le concept de libido définit par Jung, c’est parce que j’estime qu’il est fondamental. « Tout se passe comme si on ne pouvait parler de la vie psychique sans penser en termes d’énergie » nous dit très justement Susanne Delord-Kacirek[1]
La libido, grande force génératrice de sens caché, est également un concept fondamental parce qu’elle anime – rend vivante - et articule la psychologie analytique.  L’énergétique jungienne correspond à une démarche de connaissance précise, originale et très structurée des processus psychiques.

De façon générale, l’apport essentiel de Jung dans ce champ conceptuel, n’est guère mentionné dés qu’on prononce son nom. Perdure à son sujet seulement l’idée automatique du litige l’ayant opposé à Freud sur la question du caractère sexuel ou non de la libido. Certes la théorie de la libido fut décrite par Jung, dans ses débuts, beaucoup en réaction à la position unilatérale et sexualiste tenue par Freud. Mais voilà, Freud était lui aussi un énergéticien, acharné et subtil, des phénomènes psychiques ; et nous savons tous que c’est sa théorie sexuelle qui fut remarquée et peu à peu appréciée par la médecine scientifique de son époque.

De fait, l’on comprend aisément combien difficile pour Jung fut l’épreuve de son éloignement du grand fondateur de l’énergie psychique. Toutefois, en dépit de l’hostilité ambiante,  il œuvra d’arrache-pied pour tenter de fonder sa propre science toute balbutiante ; poussée puissante, poussée débordante d’une science que l’on découvre avec délice dans "Métamorphose de l’âme et ses symboles". On comprend, aussi,  qu’il fut fort occupé ensuite et ce jusqu’en 1930 à produire une théorie acceptable par la communauté scientifique. Pour finir, il fut vivement critiqué et mal critiqué. Freud l’accusa même de rétrograder la psychanalyse, ce qui est totalement faux bien entendu. Cette accusation et bien d’autres proviennent d’une méconnaissance totale des caractéristiques fondamentales de la théorie de la libido. 

Ce qui échappe, précisément, aux non connaisseurs de la théorie jugienne de la libido, c’est qu’elle sert à appréhender les processus forcément mouvants-vivants de la psyché humaine. Ecoutons à nouveau Susanne Delord-Kacirek, grande spécialiste de la pensée énergéticienne de Jung : "Nous pouvons nous attendre à une grande mouvance de la théorie de la libido. Comment en serait-il autrement puisque l’ambition de la pensée énergéticienne est justement d’appréhender le mouvant,  quoi de plus mouvant que l’infinie variabilité de la vie psychique".  

De plus, en introduisant l’idée selon laquelle la libido est un véritable X (voir ici), Jung a renoncé  "volontairement au rêve de puissance qu’alimente la prétention à la connaissance".  De sorte que l’on ne peut guère prétendre qu’il ait cherché à enfermer sa théorie dans un dogme, une foi, ou dans une quelconque affirmation métaphysique. Nous trouvons juste l’éloge d’un X. Jung à créé la science du mouvant applicable au psychisme, la science de ce qui advient, et donc de se qui se transforme par et dans l’inconscient. Tâche ardue, à n’en pas douter, s’agissant de mettre en mot et dans un style clair et concis l’ampleur de cette mouvance psychique ; l’exercice se révèle être une véritable réussite chez Jung.

SDK nous dit encore, « la théorie de la libido est d’abord une théorie des transformations psychiques, qui vise en même temps leur mise en œuvre ». C’est vers l'explication de cette transformation de la libido que je souhaite conduire peu à peu mes lecteurs. Pour ce faire, je continuerais à m’appuyer sur l’ouvrage grandiose de Jung, "Métamorphose de l’âme et ses symboles". Enfin, comme d’habitude mon travail se fonde sur ma compréhension personnelle et globale des textes de Jung.



[1] Le concept de libido selon C.G.Jung - Susanne DELORD KACIREK in Cahiers jungiens de psychanalyse, n° 28 (1980)

Illustration : aquarelle "Mouvance" de Françoise Dubourg (www.francoise-dubourg.com)

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