20 octobre 2006

L'inconscient collectif ou le continent perdu de la mémoria


The Untold Story - Josephine Wall - <br />Vous avez sans doute compris ma démarche : elle consiste à regarder l'inconscient non pas sous son aspect négatif, c'est-à-dire comme "une poubelle de sensation mal digérées" et gênantes mais comme la grande et vaste mémoire de l'âme. Cette âme, j'oublie souvent de le souligner, qui est aussi en correspondance avec le corps. C'est cela l'inconscient collectif : l'inscription dans une grande région de la psyché du passé collectif et imaginal. Outre les contenus faisant référence au passé, il existe aussi dans l'inconscient des contenus qui font référence au futur. Et parmi les dominantes de l'inconscient provenant du futur, il y a le Soi que j'ai déjà décrit très succinctement et qui fera l'objet d'un billet particulier. Des éléments du passé et du futur peuplent donc, parfois en se mélangeant, le grand territoire de l'inconscient collectif. Voilà pourquoi l'étude de l'inconscient est rendu parfois très difficile. Entre le passé et le futur réside le présent, dont la gestion est confiée au conscient qui a à sa charge l'expression par exemple de la volonté, et que nous étudierons aussi dans un billet à part.
L'on comprendra mieux alors, pourquoi lorsque certains contenus inaccessibles pénètrent ou font irruption dans la conscience, cela peut causer beaucoup de désordres en lieu et place de la psyché consciente. Parfois, cela peut déboucher sur la folie.
C'est d'ailleurs par le biais de la folie qu'a été découvert l'inconscient. (voir le billet : Les méandres de la découverte de l'inconscient Freudien)

Nous savons que Freud, par son traitement par la parole, recueillit de ses patients un grand nombre de souvenirs composés d'évènements traumatisants de l'enfance. Comme les patients s'exprimaient en quelque sorte sans frein, il apparut très vite à Freud que les souvenirs de ses patients étaient dépositaires pas seulement de réalités, mais de fantaisies aussi. Autrement dit lorsqu'on laissait s'exprimer librement les malades, ces derniers en arrivaient à évoquer des scènes ou des personnages qui ne faisaint pas parties de leurs vécus personnels. Dans le langage psychiatrique, on appelle cela des idées délirantes, des hallucinations, des fantaisies.
Freud dû se rendre à l'évidence ; tout ne pouvait pas découler des évènements traumatisants de l'enfance ; il existait bien un au-delà de la vie personnelle, un au-delà qu'il finit par nommer "le ça". Pour lui enfin, la manifestation des fantaisies et des hallucinations exprimait un phénomène névrotique, c'est-à-dire que si les fantaisies déboulaient dans la conscience, c'était parce que le conscient n'exerçait plus un contrôle vigil suffisant. Sauf si bien sûr le patient parvenait à sublimer les énergies du "ça", autrement dit à les diriger vers une activité sociale, vers des valeurs affectives élevées etc.

Jung analysa très tôt tout autrement les fantaisies de ses malades. Très vite il compris que Freud avait incontestablement redécouvert un continent fort ancien, la fameuse mémoria[1] de Saint Augustin. Les malades exprimaient en réalité, à travers leurs fantaisies des formes de pensées archétypiques et mythologiques. L'étude des productions pathologiques – les idées délirantes, les hallucinations etc - ont permis ainsi de redécouvrir la mémoria, ou, pour dire les choses autrement le continent enfoui de l'âme. Car quand nous commençâmes à nous identifier au moi volitif et rationnel, à l'époque de la psychologie des lumières (au 17è) nous perdîmes tout contact avec la mémoria qui avait commencé déjà en fait avec Platon. Puis avec Saint Augustin. C'est comme cela que la mémoria devint inconsciente.

Voici un extrait de Saint Augstin s'exprimant sur elle, la mémoria, et tiré du livre de James Hillman, "Le mythe de la psychanalyse" – Ed imago –
"La memoria, (ou l'inconscient comme Jung l'appela), est à la fois "dans mon esprit" et bien au-delà de moi et de la portée de mon esprit../.. Grande est la puissance de la mémoire ; elle est je ne sais quoi d'effrayant ô mon Dieu, une suite infinie d'abîmes profonds et cela, c'est l'esprit, et c'est moi-même. Que suis-je donc, mon Dieu, quelle nature suis-je ?."

Il fallu attendre l'étude des maladies mentales, donc, pour découvrir la face perdue de notre âme. Une face qui peut sembler déroutante tant la mémoria impersonnelle (l'inconscient collectif de Jung) paraît incommensurablement riche d'innombrables variétés d'éléments. Kant l'appelait "le champ des idées obscures de l'homme". Platon parlait de réminiscences de l'âme. Il y aurait bien sûr un parallèle intéressant à faire avec la notion hindoue du karma.
De toute façon, rien ne naît de rien ; l'invention d'un esprit qui ne soit qu'une tabula rasa[2], a servi je pense à évacuer, au plus vite, le problème de l'âme ainsi que le poids effrayant de sa mémoire qui se faisait ressentir.

Hymne aux Fantaisies et à l'imagination
Je voudrais enfin vous faire découvrir un texte pêché encore dans le livre de James Hillman, un texte que je trouve terriblement émouvant et touchant. Il restitue enfin aux fantaisies qui peuplent notre monde intérieur, leurs vraies places, leurs vraies fonctions, la juste manière dont nous devrions les traiter, les aimer et les écouter : aujourd'hui encore, alors que le continent de la mémoria n'est plus totalement englouti, on a trop tendance à les dévaloriser, à les mal juger, et à les qualifier de pathologiques….Mais ce sont des bouts de notre âme qui s'expriment à travers eux ! N'oublions jamais cela.
Jung disait qu'une partie de l'inconscient, notre âme, donc, aime à s'exprimer par des images, (par la mythologie donc), parce que cette forme d'expression convient à la nature de l'âme. Le mode d'expression imagé, fantaisiste, symbolique, ou métaphorique, est le langage de l'âme, et c'est aussi ce que l'on appelle la pensée imaginale, ou encore la pensée imaginative. Elle est, nous verrons ceci plus tard, le langage qui est utilisée par l'astrologie. Elle est une pensée qui relève plus de l'art que d'un savoir conceptuel. Nous étudierons d'ailleurs la pensée imaginative dans le prochain billet.

Bon, comme convenu, je laisse à présent la parole à James Hillman :

"Mais ne feignons pas de croire que la fantaisie est la facilité. Lorsque les patients de Freud s'allongèrent et se mirent à se remémorer, ils trouvèrent leurs fantaisies gênantes. Freud aussi les trouva embarrassantes. Seuls avec l'autre et ses imaginations, locuteur et auditeur évitaient de se regarder. Leurs yeux ne se croisaient pas. Pourquoi ce trouble à raconter, et pourquoi sommes-nous gênés d'entendre les histoires intimes de l'imagination d'autrui ? La vie intérieure serait-elle vraiment une affaire à cacher avec des feuilles de vigne ?
Cette honte témoigne de l'importance de nos fantaisies. Au jourd'hui on la qualifie professionnellement de "résistance" ; mais quelle fonction la résistance accomplit-elle ? Il est vrai que je me défends de narrer mes rêveries, mes haines brûlantes, mes désirs, mes peurs et leur incontrôlable imagerie. Mes imaginations sont comme des blessures ; elles révèlent ma pathologie. La résistance me protège. Les fantaisies sont incompatibles avec mon moi courant, et c'est parce qu'elles sont incontrôlables et "fantasmatiques" – à savoir, éloignées du rapport à la réalité du moi – que nous les ressentons comme étrangères. Notre volonté et notre intelligence ne nous gênent pas de la même façon ; à vrai dire, nous en exhibons fièrement les résultats. Mais nous avons tendance à tenir caché et enfermé en nous ce qui naît de l'imagination. L'imagination est un monde intérieur – non pas spatialement intérieur – mais contenu, ésotérique, aspect interne de la conscience. Ces affections et fantaisies forment l'aspect imaginal ou inconscient de nos actes et de nos pensées. Cette part de l'âme que nous gardons pour nous devient fondamentale dans l'analyse, la confession ou la prière, entre amants et amis, dans la création artistique, pour ce que nous entendons par "dire la vérité", et enfin, pour notre destin. Ce que nous retenons celé dans notre monde imaginal ne se réduit pas aux images et aux idées, étant aussi des fragments vivants de l'âme ; quand ceux-ci sont énoncés, un peu d'âme passe avec eux. Lorsque nous contons nos imaginations, nous révélons notre âme. La honte que nous ressentons concerne moins le contenu de la fantaisie que sa simple existence ; la révélation de l'imagination est la mise à jour de l'esprit incontrôlable et spontané, part divine et immortelle de l'âme, la memoria Dei. C'est la honte du sacrilège que nous éprouvons ; la révélation de nos fantaisies dévoile le divin, et en conséquence nos fantaisies nous sont étrangères parce qu'elles ne nous appartiennent pas. Elles sortent du fond transpersonnel de la nature, de l'esprit ou du divin, alors même qu'elles sont personnalisées à travers notre vie et poussent notre personnalité à des actes mythiques."

à suivre...



Notes
[1]Le parallèle entre l'inconscient et mémoria nous dit Hillman s'inspire du livre brillant et passionnant de Frances Yates, The art of Memory. Cet ouvrage montre qu'il existe un art de la mémoire.
[2]Tabula rasa est un concept philosophique qui fut utilisé par Locke pour signifier que l'esprit désigne uniquement de la volonté et des connaissances apprises.


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28 septembre 2006

L'inconscient Jungien : une structure par couches


Dans le précédent billet, j'ai présenté brièvement le double découpage catégoriel proposé par Jung lui-même, afférent au vaste domaine des contenus de l'inconscient à savoir – les contenus accessibles et les contenus inaccessibles - En se plaçant dans une approche de ce type, l'on évite ainsi de confiner le champ de la connaissance de l'inconscient au seul domaine des réalités banales et quotidiennes à savoir les lapsus, les fausses perceptions, les oublis momentanés, les processus de dénégation et de refoulement. Il n'est pas question de mettre en doute l'existence de ces désordres et états psychiques involontaires et irrationnels survenant chez les personnes humaines fréquemment - lesquels ont été, du reste, brillamment exposés par Freud dans son célèbre manuel "Psychopathologie de la vie quotidienne [1]"- Il convient simplement d'analyser d'une façon toute particulière les contenus inaccessibles de l'inconscient, en ce sens où ceux-ci recèlent des germes de contenus de nature spirituelle propre à déclencher le processus d'auto guérison tel qu'il a été expliqué à maintes reprises par Jung dans ces textes. Le "miracle" de l'harmonisation des contenus conscients et inconscients s'obtient notamment lorsque nous laissons le processus naturel et spirituel de l'individuation se dérouler en paix. Je reviendrai à cette question dans la suite de mon exposé. Pour l'instant, tournons-nous encore une fois vers le descriptif général des contenus dits inaccessibles de l'inconscient suivant une perspective exclusivement jungienne.

L'inconscient personnel
Les contenus inaccessibles représentent, en fait, ce que Jung a nommé les couches de l'inconscient personnel et celles de l'inconscient collectif.
En simplifiant beaucoup, nous dirons que les couches de l'inconscient personnel concernent le vécu personnel et renferment en particulier tous les éléments psychologiques difficilement appréhendables par le conscient : toutes les tendances infantiles, les fragments du temps passé laissés en jachères, les contenus mentaux désagréables ainsi que tous les complexes habituels [2]. L'inconscient personnel contient pour une bonne partie aussi l'ombre qui figure les côtés sombres du sujet humain ; autrement dit la nature animale qui vit en nous, celle que nous désirons plutôt nier et qui obéit de façon absolue à l'instinct. Il est pour moi absolument hors de doute que nous aurons une nature animale tant que nous posséderons un corps physique. En général, l'ombre, ou le côté négatif de notre nature dans le mental conscient apparaît sous les traits d'un adversaire intérieur de taille, voire la plupart du temps plutôt monstrueux. Un adversaire, quoi qu'il en soit qu'il nous faudra bien un jour faire rentrer pacifiquement dans l'ensemble de notre propre nature si nous voulons être complets. Intégrer notre côté négatif revient, en fait, à instaurer une bonne entente avec nos forces instinctives ; l'instinct n'est jamais négatif en soi. Il réclame, certes, d'être affûté, plutôt beaucoup que pas assez même, mais nous ne devons toutefois jamais perdre de vue que la sphère des instincts et des pulsions est chargée massivement d'énergie ; une énergie dont il serait regrettable de se priver tant les forces qui découlent d'elle sont profitablement réutilisables en terme de volonté et de motivation par le conscient Car quoiqu'en pense notre échelle de valeurs morales, les instincts sont à ranger du côté de la Vie, et de l'âme donc.

L'inconscient collectif, les archétypes et le Soi
Les couches plus profondes et plus archaïques, connues sous le nom de "psyché super-individuelle", ou encore "impersonnelle", Jung les a nommées l'inconscient collectif. C'est la psyché inconsciente commune à toute l'humanité ; Tout comme le corps humain révèle une anatomie commune, par-delà toutes les différences raciales, la psyché possède de son côté au-delà de toutes distinctions culturelles et conscientes, un substrat collectif, nous dit Jung. De plus, nous savons grâce à ce dernier que la psyché collective est la demeure des nombreuses images originelles, lesquelles ont servi depuis les temps les plus anciens notamment à la formation des représentations des Dieux et Déesses, alors même que ceux qui les ont pensées, soit les hommes primitifs, n'avaient jamais rencontré physiquement ces différentes représentations. De nos jours, le flot infini d'images et de formes de l'inconscient collectif émerge toujours à la conscience à l'occasion de rêves ou encore d'états mentaux anormaux.

Dans cet océan d'images, nous dit également Jung, ce sont formés les archétypes, sorte de silhouettes mortes, c'est-à-dire non vécues individuellement ; celles-ci sont semblables à des sédimentations d'expériences vécues. Jung utilise le vocable "sédimentation" ou celui de "précipitation" d'expériences humaines parce que la notion d'archétype amenée, par Jung, renvoie précisément au comportement humain qui se répète depuis des éternités. Les images mythologiques, par exemple, sont les marqueurs du condensé de la moyenne historique – autre expression que Jung utilise pour désigner le contenu de l'inconscient collectif – les plus notablement remarquables. L'inconscient collectif contient, donc, tout notre passé collectif non vécu, mais susceptible de produire des représentations, au sein duquel - et c'est précisément l'aspect de la psychologie jungienne qui m'intéresse le plus - pourra émerger le Soi [3]. Le Soi est exactement parallèle au "devenir ce que l'on est", c'est-à-dire au fait de devenir une pierre du grand édifice que constitue le tout vivant. L’on comprendra alors mieux, d’après ce qui vient d’être dit, pourquoi pour pouvoir devenir soi-même, nous devons aussi veiller à ne pas trop se laisser envahir par nos jérémiades égoïstes et ne pas non plus trop se murer dans le passé et les évènements personnels et/ou familiaux qui n'expriment que la petite partie de la personnalité.

Jung ne cessera de répéter, tout au long de son œuvre, que pour contacter notre soi, il faut plonger dans l'inconscient collectif - ce plongeon symbolique fait référence, bien évidemment, à la confrontation avec l'inconscient -
Dans cette idée, Jung conçoit l'inconscient comme une matrice créatrice d'avenir. Mais cela sous entend aussi que pour pouvoir en quelque sorte re-naître dans un futur indéterminé et à jamais indéterminable, car ici ce sont seules les lois de la Vie qui décident - il faut accepter de se perdre pendant un petit temps au moins, dans la mer parfois très dangereuse des forces irrationnelles et chaotiques – cette idée exprime d'ailleurs le célèbre "retour aux royaumes des mères" souligné par le Docteur Faust dans l'œuvre de Goethe – Le thème de la renaissance symbolique se trouve de même évoqué dans les textes de la Bible, à travers l'image de l'immaculée conception relative à la Vierge Marie. Puisque Jung n'a pas manqué de faire la remarque suivante[4] : La conception virginale signifie qu'un contenu de l'inconscient est né sans la participation naturelle d'un père humain (c'est-à-dire sans la participation du conscient).
Au passage, je signale, que là où la théologie chrétienne échoue à apporter une voie d'explication plausible et sensée aux grandes idées mystérieuses et étranges dont les textes sacrés sont pleins, la psychologie jungienne, unique dans son espèce réussie, je trouve, magistralement. Elle apporte enfin un sens profond et vivant, repérable dans son corps et dans sa psyché, aux différents thèmes et objets solennels présents dans toute croyance religieuse.

Enfin il importe de souligner que dans le Soi, réside notre "noyau divin". C'est pourquoi aussi les images de l'inconscient collectif possèdent une puissante force d'attraction et de fascination. Nous étudierons, bien entendu, cela avec plus de détails dans les prochains petits billets…



Notes
[1]Psychopathologie de la vie quotidienne – Edition petite bibliothèque Payot -
[2]Les complexes habituels de l’individu sont les points sensibles de la psyché contenant notamment des thèmes affectifs refoulés, susceptibles de provoquer des troubles permanents dans notre vie psychique, ou même les symptômes d’une névrose.
[3]Le Soi est l'archétype de la totalité transcendante.
[4]Lire "Métamorphose de l'âme et ses symboles" Edition Buchet/Chastel


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18 août 2006

Le monde de l'inconscient Jungien

«L’homme occidental devrait redécouvrir ces puissances psychiques au lieu d’attendre que ses humeurs, sa nervosité et ses idées insensées viennent lui montrer de la façon la plus douloureuse qu’il n’est pas seul maître dans sa maison »
On peut dire, à bon droit, que la découverte de l'inconscient freudien a permis que soit enfin prise très au sérieux la réalité de l'existence des profondeurs inconscientes de la nature humaine. Dans le monde d'avant Freud, qui se plaisait à exalter majoritairement les puissances de la réalité sensible, cette découverte a manifestement apporté beaucoup de bien. Certes, le sens de l'inconscient freudien est resté très confiné, notamment au rôle de siège des pulsions sexuelles. L'inconscient de Freud désigne, comme je l'ai déjà indiqué, exactement tout le refoulé, autrement dit les instincts et les pulsions non compatibles avec le comportement moral qu'exige de nous le conscient ; car ce fut là les attentes initiales de notre famille et de notre entourage. Freud concevait par exemple, la folie comme étant l'expression d'un dysfonctionnement des instincts qui aurait démarré à l'enfance. C'est un peu comme si les forces inconscientes, tenues trop longtemps à l'écart, se mettaient un beau jour, puis durant toute la vie, à dicter à la conscience certains comportements anormaux, ou symptômes énigmatiques [1]. Il n'est pas faux de dire que l'inconscient renferme des éléments psychologiques de la personne qui auraient été bannis à cause de l'éducation.
Toutefois limiter la conception de l'inconscient à l'activité plus ou moins perturbatrice et stagnante des pulsions sexuelles, relève sans doute d'un homme, Freud, qui n'a su, hélas, dépasser la problématique de sa propre psychologie personnelle. Car la sexualité n'est bien sûr, qu'un des instincts biologiques, à côté de pas mal d'autres. Pourquoi donc, l'inconscient désignerait-il les déroulements du destin de ce seul instinct ?

atlantis - Josephine WallIl en est tout autrement dès que nous abordons l'inconscient jungien. Beaucoup plus vaste et varié, ce dernier renferme absolument tout ce qui existe dans la nature humaine : aussi bien les vices que les vertus. "L' inconscient est neutre, il n'est rien que nature, aussi spirituel que chthonique" nous dit Jung.
Le problème est que l'on nous a longtemps habitués à rester très méfiant à l'égard de ce que l'on appelle la nature. "On" représente en premier lieu la doctrine chrétienne. N'enseigne-t-elle pas que la nature humaine est essentiellement mauvaise ? Mais même les psychologues les plus éclairés et avertis tel que Freud ont donné une idée fort désagréable des arrière-plans et des profondeurs psychiques qui dorment au fond de la nature humaine. Or, ainsi que l'indique Jung "l'esprit est rempli des plus étranges contradictions. Nous louons la "sainte maternité" et ne pensons pas à la rendre responsable de tous les monstres humains, criminels, aliénés dangereux, épileptiques, idiots, et infirmes.

Il est clair que la notion d'inconscient touche à des aspects totalement irrationnels de la vie. Croire en son existence implique d'admettre qu'une chose et son contraire puissent cohabiter ensemble et en même temps être issus d'une seule et même source. Autant dire que l'inconscient nous confronte à vivre des expériences et des situations qui sont aux antipodes de ce que notre raison consciente a l'habitude de rencontrer. C'est pourquoi, en général, la personnalité consciente a tendance à rejeter ce qui n'est pas accordé au rationnel ; parmi ces rejetons, donc, nous citerons l'inconscient et les phénomènes qui s'y déroulent.

Les contenus de l'inconscient
L'inconscient est infini, et nous ne pourrons jamais en déceler exactement la nature réelle. Toutefois, grâce aux très nombreuses années d'expériences psychologiques et psychiatriques accumulées par Jung et ses successeurs, nous savons sur lui, déjà beaucoup de choses.

Outre les tendances infantiles, fortement soulignées dans la théorie freudienne, et qui se trouvent effectivement fréquemment mises en plein relief [2], l'inconscient recèle "tous les matériaux psychiques qui n'ont pas atteint l'intensité qui permettraient de franchir le seuil du conscient". Ce seuil demeure infranchi, nous dit Jung, non pas uniquement à cause du mécanisme du refoulement, mais parce qu'aussi certains éléments n'ont pas atteint un niveau de tension psychologique suffisant dans le conscient. Ce pourquoi nous dit Jung, ces contenus ont glissé d'eux-mêmes, sous le seuil du conscient.

En résumé, se retrouvent dans l'inconscient[3], donc :

Les contenus inconscients accessibles : éléments dont nous pourrions tout aussi bien avoir conscience tels que : avoir conscience de la position de son corps dans l’espace, de certains gestes ou de certaines expressions de son visage. Il y a une foule de choses que nous faisons sans porter notre conscience dessus : regarder sa montre l’y ranger, fermer sa porte à clé...

Les contenus inconscients médiatement accessibles : les mots qu’on a sous le bout de la langue. Ou bien le nœud qu’on fait à son mouchoir. Ou bien quand l’inconscient se met à élaborer des souvenirs d’enfances à cause d’une sensation bien particulière.

Dans la catégorie des contenus inaccessibles, nous trouvons enfin,
- les souvenirs de l'enfances : "« la conscience enfantine, considérée avec le recul du temps, ressemble à un archipel d’images isolées émergeant des flots »".
- Les symptômes névrotiques qui indiquent la présence de contenus inconscients que le sujet ne peut ni préciser, ni définir.
- Des états dont on est la proie : des sentiments, des humeurs d’une tonalité bien déterminée mais difficiles à décrire car ils plongent leurs racines dans des sphères qui sont hors de portée pour la conscience
- Et enfin, ce qui n’a jamais été conscient ; un bon exemple en est : les idées créatrices qui jaillissent dans notre esprit.

à suivre...



Notes
[1]Il faut garder présent à l'esprit que c'est en tentant de remonter aux sources de la folie que Freud a découvert une justification détaillée à sa conception de l'inconscient.
[2]On parlera dans ce cas de "réminiscences de la vie infantile"
[3]source "Dialectique du Moi et de L'inconscient" & "l'homme à la découverte de son âme".



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12 juillet 2006

Les méandres de la découverte de l'inconscient Freudien

Kinuko Y. CraftMême s'il plaisait beaucoup à Freud d'être reconnu sous la bannière d'un très grand "découvreur", tout le monde sait cela à présent ; la découverte de l'inconscient ne date pas de lui. L'inconscient des philosophes s'est chargé bien avant Freud de faire entendre sa voix lointaine et profonde depuis l'arrière-plan de l'activité psychique consciente. Le savoir légué par de nombreux philosophes sur l'inconscient (Lire) a montré que ce dernier pouvait être vu soit comme une force vitale soit comme une absence de perception. D'aucuns diront que la signification à caractère mystique de l'inconscient, qu'elle soit d'hier ou d'aujourd'hui n'a pas grand-chose à voir avec l'inconscient tel qu'il fut invoqué par Freud. Etant admis également que l'inconscient tel qu'il est passé dans les moeurs d'aujourd'hui ne désigne pas non plus l'inconscient freudien. Ainsi sommes-nous en droit de nous demander : y a-t-il eu réellement une 'trouvaille' freudienne ? Si oui, quelle est-elle et comment est-elle arrivée ? À ces deux questions, je tâcherai de répondre dans ce qui va suivre.

Les débuts de la pratique
Les débuts de la psychanalyse et donc de l'hypothèse sur l'inconscient freudien doivent beaucoup à un stage déterminant que Freud effectua à l'hôpital parisien de la Salpêtrière où officiait le très célèbre neurologue Jean Martin Charcot. Cela se passait en 1885. Et à cette époque, dans le milieu psychiatrique l'on remettait souvent sur le tapis de la discussion les causes de l'hystérie[1]. La manifestation polymorphe des symptômes de cette drôle de névrose rendait difficile la probabilité d'une simple affection organique du cerveau comme cause et origine de l'hystérie. Maladie inclassable donc, qui plongeait les malades dans des états particulièrement bizarres et énigmatiques, l'hystérie et ses symptômes physiques - comme la perte de connaissance, le raidissement du corps, les grimaces théâtrales finissaient par trahir aux yeux des psychiatres l'expression d'exagérations et de simulations intentionnelles. D'ailleurs pour "punir" de leur soi-disant- mensonges, ces malades, les psychiatres en vinrent à se désintéresser peu à peu d'eux. Sauf Charcot qui prit par contre leurs cas très au sérieux. Au départ, ce dernier donnait comme cause des symptômes pathologiques de l'hystérie la dégénérescence d'origine héréditaire du système nerveux. Or, comme on pouvait faire apparaître et disparaître les symptômes de ce tableau clinique - surtout les paralysies – lorsque le patient était en état hypnotique, il devint évident que l'origine des symptômes de l'hystérie devait provenir non pas de causes organiques, mais de causes entièrement psychologiques.

Voici ce qu'écrivit Freud à sa fiancée le 24 novembre 1885 : "Charcot, qui est l'un des plus grand médecin et dont la raison confine au génie, est tout simplement en train de démolir mes conceptions et mes desseins. Il m'arrive de sortir de ses cours comme si je sortais de Notre Dame, tout plein de nouvelles idées sur la perfection…La graine produira-t-elle son fruit ? Je l'ignore ; mais ce que je sais, c'est qu'aucun autre homme n'a jamais eu autant d'influence sur moi."

Exalté par les théories de Charcot, Freud décida donc d'ouvrir son cabinet médical, et de pratiquer l'hypnose sur ces patients, cela contre l'avis même des maîtres viennois qui voyaient d'un très mauvais œil les travaux que menait le neurologue parisien. Quelque temps plus tard, même si Freud s'irritait souvent de la précarité des résultats qu'il obtenait dans sa pratique, il put toutefois étudier plusieurs cas cliniques devenus fort célèbres [2] qui le mirent, lui et son ami médecin et psychiatre Breuer, sur la voie d'une très grande découverte pour la nouvelle psychologie : "la cure par la parole", dite aussi la méthode cathartique[3]. En effet, un jour une de ses patientes lui suggéra de la laisser parler librement. Freud accepta, l'écouta et pu ainsi découvrir chez sa patiente que la verbalisation de l'affect et des émotions, jusqu'alors oubliées et que seule l'hypnose permettait de révéler, pouvait lui apprendre tout ce qui était nécessaire de savoir pour pouvoir traiter le problème de sa malade, notamment l'existence du lien entre le traumatisme et les symptômes récurrents.

Freud découvrit qu'en fait, l'hystérie provenait de blessures psychologiques dont l'impression pénible dit aussi affect[4] restait à l'état inconscient pendant de longues années. En clair, l'hystérique souffre de vieux souvenirs traumatiques oubliés et devenus des idées fixes à l'insu même des malades. Comme cause du trauma psychique, il pouvait s'agir par exemple d'une grosse frayeur, de la disparition d'un proche ou de tout évènement pénible survenu dans l'enfance. À un moment ou à un autre, les souvenirs pénibles et oubliés reviennent à la surface sous la forme de symptômes… Le symptôme venant signifier, dans ce cas, la présence de résidus émotifs de tout l'affect bloqué c'est-à-dire non liquidé. Car Freud a montré également quel mécanisme précis présidait à la formation des troubles psychiques et physiques dans la névrose d'hystérie, mais qui est valable également pour tous les gens normaux. En quelques mots, lorsque, chez le malade, l'évènement déclenchant - le traumatisme psychique donc - a pu provoquer ou déclencher chez lui une réaction d'énergie[5], par exemple une crise de larme, ou une décharge de colère ; alors seulement, l'évacuation d'une grande partie de l'affect déplaisant pouvait avoir lieu. Aprés cela, normalement aucun futur symptôme d'hystérie n'auvait de chance de se manifester.
Par contre, si l'affect est resté attaché aux souvenirs, s'il n'y a eu aucune décharge, par exemple si on n'a pas pu se venger, ne fut-ce qu'en paroles - si on a rien pu dire suite à une très grosse déception ou humiliation – dans ce cas, aucun effet réellement cathartique ne saurait être engrangé. Cela signifie que les souvenirs endossant une lourde charge émotive sont susceptibles alors de provoquer l'apparition de phénomènes hystériques.

J'ai fait le choix de faire quelques petits arrêts sur image sur le cheminement de l'étude de l'hystérie - lire pour plus d'arrêts encore le livre "Etude sur l'hystérie" de Sigmund Freud et Joseph Breur, Ed. Puf - car il est clair que ces études ont joué un rôle capital dans la genèse des présuppositions d'idées qui constitueront la base du développement de la psychanalyse. De plus ce cheminement de la découverte des causes de l'hystérie constitue, bien entendu, l'échelon initial de la méthode psychanalytique que Freud mettra au point touche par touche.
Il ne fait aucun doute que la preuve sur l'existence de l'inconscient fut apportée à Freud par l'hypnose. Car si, en état d'hypnose, le malade se souvient d'incidents ou de scènes douloureuses qu'il oublie aussitôt lorsqu'il redevient conscient, cela prouve alors (pour Freud) que l'inconscient existe bien.
L'inconscient freudien est donc l'endroit où sont stockés tous les souvenirs pénibles. Il contient tous les contenus mentaux refoulés, oubliés parce que bannis par l'éducation. Il est tout "le retenu", tout ce que l'on garde en soi. Ce contenu finissant un jour ou l'autre par créer des symptômes[6] ; voilà ce que nous ont appris les premières trouvailles freudiennes.

La découverte du refoulement
Mais les conclusions de Freud font également ressortir le constat suivant : les malades, à l'état de veille, n'ont jamais consenti facilement à livrer leurs souvenirs traumatisants et inconscients. Cela ne manqua pas de suggérer à Freud l'idée qu'il devait exister une force psychique qui cherche à s'opposer à la prise de conscience par le malade de la représentation pathogène, dès lors que l'on essaie de ramener à sa conscience des souvenirs inconscients. "Cette force qui maintient à l'état morbide, on l'éprouve comme une résistance opposée au malade". Freud a appelé ce processus psychique que lui a permis de découvrir l'hystérie "refoulement"
Selon Freud encore, "Les mêmes forces qui aujourd'hui s'opposent à la réintégration de l'oublié dans l'inconscient sont assurément celles qui ont, au moment du traumatisme, provoqué cet oubli et qui ont refoulé dans l'inconscient les incidents pathogènes". En d'autres mots, cette force de répulsion est celle-là même qui s'est manifestée par un rejet lors de la genèse du syndrome.
Il semblerait en dernière analyse, que ce processus inconscient fait à la fois de rétention et de rejet des souvenirs se maintient tant que ce qui doit être su par le conscient ne se passe pas alors que c'est lui-même, le conscient, ou encore ce que Freud à appeler "la censure", qui l'empêche de passer.
Nul doute que l'inconscient de Freud constitue le pire ennemi et adversaire du développement conscient des hommes. Quelle différence avec l'inconscient de Jung, chez lequel les deux, le conscient et l'inconscient existent dans un rapport permanent d'équilibre et de compensation !

L'hégémonie de la sexualité
Enfin, le dernier aspect des découvertes freudiennes d'importance est la question sexuelle. Freud en 1895, a finalement rectifié l'hypothèse d'une origine traumatique de l'hystérie. En effet, les découvertes qu'il réalisa toujours à partir de l'observation de nombreux cas cliniques ainsi que celles qu'il fit au cours de son auto-analyse, l'ont conduit à cesser de voir comme facteur déclanchant des symptômes hystériques des évènements traumatiques banals ; à la place il vit l'intervention d'évènements sexuels. Voici un court extrait de ce qu'il écrivit à son ami Fliess :
"J'ai trouvé en moi des sentiments d'amour envers ma mère et la jalousie envers le père, et je pense maintenant qu'ils sont un fait universel de la petite enfant. Si c'est ainsi, on comprend alors la puissance du roi Œdipe".
Il constata de même chez ses patients, qu'à la source de tout traumatisme psychique on retrouve en général, toujours bien enfouis, des évènements sexuels remontants de la petite enfance.
Freud signale aussi :"A savoir que ce sont les désirs inéluctables et refoulés de l'enfance qui ont prêté leur puissance à la formation de symptômes sans lesquels la réaction aux traumatismes ultérieurs aurait pris un cours normal."
Cette phrase de Freud est très importante, car elle explique qu'en somme c'est parce qu'il existe tout au fond de la personne une vieille tendance au refoulement sexuel que le traumatisme actuel ne peut être liquidé normalement. En somme la source du traumatisme psychique réside pour Freud toujours dans le passé de l'enfance au cours duquel les fixations infantiles et les désirs d'inceste ont pris racine. L'inconscient freudien se trouve toujours mis en rapport avec le passé personnel des malades de même qu'avec un lieu depuis lequel la sexualité semble tout orchestrer d'une main invisible aux yeux du malade. C'est elle, la sexualité qui cause la maladie des hystériques, de même que c'est elle qui constitue un facteur motivant pour le rejet et le refoulement de certaines représentations – que Freud choisit de nommer également la libido interdite car refoulée hors du champ de la conscience. À ce stade du déroulement des découvertes freudiennes, les deux piliers de la psychanalyse étaient posés : la théorie de la sexualité infantile et la théorie du refoulement.

En résumé la vision freudienne fait ressortir que : La vie psychique est gouvernée par des pulsions primaires –parmi lesquelles la sexualité tient une place centrale. Ces pulsions sont gouvernées par le seul principe de plaisir, c'est-à-dire qu'elles ne visent qu'à leur réalisation.. À la petite enfance, le petit garçon manifeste le désir de posséder sa mère et tuer son père dont il est jaloux. Mais cette pulsion se heurte à un interdit, interdit qui se manifeste au niveau du psychisme lui-même sous forme d'une censure. Refoulé dans l'inconscient des désirs latents s'expriment sous des formes détournées à travers les rêves, les actes manqués, ou les mots d'esprits. Si ce conflit entre les pulsions et les forces de répulsion est trop fort, cela produit des troubles névrotiques (hystérie, paranoïa, phobie, etc) -source SH n°113-

Le rejet de l'inconscient
En 1920, Feud propose à nouveau une refonte totale de sa théorie. Ce moment a été appelé la seconde topique. A l'intérieur de celle-ci, il modifie d'abord la théorie des pulsions. Désormais ce n'est plus les pulsions sexuelles (Eros) répondant au principe de plaisir, qui mettent en mouvement toutes l'activité psychique de l'individu ; Freud voit à présent l'action concomitante de Thanatos, la pulsion de mort qui vise la destruction de l'individu et la répétition compulsive des scènes traumatiques.

Il modifiera également sa conception structurale de l'appareil psychique. Il propose d'abord d'abandonner la notion d'inconscient conçue comme le réservoir de tout le refoulé, parce qu'il estime cela trop ambiguë. Il préfère lui substituer le système suivant : préconscient/conscient/inconscient. Le préconscient figure une sorte d'inconscient latent qui se transforme aisément en conscient. Là stationneraient tous les produits de la censure. Alors que l'inconscient proprement dit, dit aussi le ça ou le réservoir des pulsions, ne deviendra pratiquement jamais conscient..

Il continuera néanmoins à apporter d'autres réaménagements à sa théorie, puisqu' à partir de 1923, Freud va souligner qu'on a tort d'assimiler le "réservoir des pulsions" (la libido, l'agressivité, l'auto-concervation ou destruction) à un état mental donné : celui d'être non conscient. Car certaines de ces pulsions primaires sont ou peuvent devenir conscientes. N'est-ce pas justement le rôle de l'analyse de les mettre à jour ? Inversement, certains mécanismes mentaux peuvent être inconscients sans appartenir au registre du pulsionnel. C'est le cas du moi et du surmoi. Qui échappent à la conscience de l'individu. En remplacement de l'ancienne théorie, il propose donc un modèle qui comprend 3 instances : le ça [8], le surmoi [9] et le moi [10] qui peuvent être inconscients ou non.

à suivre...


Notes
[1] Le terme d'hystérie date de la médecine grecque antique, et signifie étymologiquement "utérus". Pour Hippocrate, c'est une maladie liée à une migration de l'utérus dans le corps. Elle affecte plutôt les femmes insatisfaites sexuellement. La médecine du 19ème siècle conserve le vieux terme grec, mais la transforme en maladie de l'encéphale ou des nerfs, c'est-à-dire une "névrose" dans le vocabulaire de l'époque.
[2] Il y eut le cas d'Anna O suivi par son ami le docteur Bleuer, les cas d'Emmy von N, Katharina, Elisabeth Von R, Dora…
[3]Du grec Katharsis : purgation, purification.
[4]L'affect correspond à une souffrance endurée sans riposte possible ;
[5]On dit dans ce cas, qu'il y a "acte d'abréaction". Exemple d'acte d'abréaction = les plaintes, la révélation d'un secret pesant (confessions), réaction par la parole par l'acte, la parole et par les larmes. Si l'abréaction ne se produit pas, l'évènement concerve toute sa valeur affective.
[6]Aujourd'hui quand survient ce type de symptômes, nous parlerons plus volontiers de maladies psychosomatiques.
[7] Selon Freud, dans l'hystérie, et tout particulièrement dans toutes les névroses, les symptômes morbides seraient liés à la vie amoureuse. Mais de cela, les malades n'aiment guère parler : écoutons Freud lui-même nous expliquer cela : "L'attitude des malades ne permet guère, il est vrai de démontrer la justesse de ma proposition. Au lieu de nous aider à comprendre leur vie sexuelle, ils cherchent, au contraire, à la cacher, par tous les moyens. Les hommes, en général, ne sont pas sincères dans ce domaine. Ils ne se montrent pas tels qu'ils sont ; ils portent un épais manteau de mensonges pour se couvrir, comme s'il faisait mauvais temps dans le monde de la sensualité. Et ils n'ont pas tort ; le soleil et le vent ne sont guère favorables à l'activité sexuelle dans notre société ; en fait, aucun de nous ne peut librement dévoiler son érotisme à ses semblables."
N'oublions pas que Freud fit ces remarques en 1893, sous l'influence certaine d'une norme morale qui engonçait fortement la société d'alors par des mœurs presque pas du tout relâchées.
[8] Le ça est le réservoir des pulsions archaïques, c'est un chaos, une marmite pleine d'émotions bouillantes. Et dont les pulsions sexuelles et agressives sont les principales sources.
[9]Le surmoi se forme au cours de l'enfance par l'intériorisation des interdits et des règles morales léguées par les parents.
[10] Le moi joue enfin le rôle d'intermédiaire entre le ça et la réalité.



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26 juin 2006

Tous ces inconscients* en nous

Celestial apparition Jonathon-earl-bowserDans ce petit billet, nous allons plus particulièrement nous intéresser à l'esprit : l'esprit conscient et son contraire l'esprit inconscient. Comme cela a été vu précédemment, s'il est une tendance qui marque bien la démarche des chercheurs d'aujourd'hui c'est l'intérêt que ceux-ci portent au cerveau, autrement dit à la matière. Leurs recherches font apparaître que c'est notre cerveau qui sécréterait la pensée ou l'esprit. Puisque, sur la question, leurs tâches consistent pour l'essentiel à trouver quel marqueur biochimique irait avec telle ou telle production de l'esprit. La conception de l'esprit humain comme n'étant rien d'autre qu'un effet biochimique relève de la discipline que l'on nomme les neurosciences, et je dirais cela témoigne ipso facto d'une psychologie sans âme. L'esprit d'ailleurs pour les neuroscientiques est considéré comme étant une simple fonction mentale au même titre que la mémoire, la perception, l'attention, le langage etc, - et non bien sûr comme une totalité à laquelle la conscience serait subordonnée -. Cette tendance matérialiste et restreinte prouve bien que les conceptions modernes sur l'esprit visent toujours, hélas, à découvrir une manifestation extérieure et compréhensible rationnellement dudit esprit.
Pourtant après la découverte freudienne de l'inconscient nous savons tous que l'homme, pour comprendre les mécanismes de la conscience humaine, est désormais invité à regarder tout au fond de lui-même. Avant Freud, les seules études sérieuses se fondant sur la connaissance intérieure, ou la connaissance de soi par soi, ont été menées par la psychologie introspective qui a vu le jour à partir du XVIIe siècle. Cette dernière posait l'intérieur de l'homme comme un existant vrai et réel. Aujourd'hui, l'introspection n'a plus la côte au sein des chercheurs psychologues. Toutefois, il est à remarquer que la définition du mot conscience retenue par les psychologues d'aujourd'hui plonge ses racines dans les thèses des partisans de l'introspection ; en effet, la conscience qu'étudient les psychologues correspond à cette faculté en soi qui donne le sentiment d'être une personne qui pense, qui agit, qui perçoit qui parle, se souvient etc…c'est ce que l'on nomme encore, la conscience réflexive, ou le cogito qui est apparu avec Descartes.
"Il ne peut rien avoir en moi dont j'ai conscience" avançait le grand philosophe français. En conséquence et suivant ses propres vues, tous les produits de l'esprit sont nécessairement connaissables. Descartes disait encore autre chose : "Je n'ai besoin d'aucune référence à mon corps pour me penser existant" . Autrement dit, "la chose qui pense" ne pouvait avoir, pour Descartes, aucun lien avec le corporel. De là découle l'antique dualité bien connue de l'âme et du corps.

Par cette idée, l'existence d'un inconscient, non pas psychique, mais purement physiologique et à ranger du côté du corps, devenait envisageable. On peut dire, à bon droit, qu'avant Freud, l'impérialisme de la conscience a servi à ouvrir une voie à la vie d'un inconscient, voie où vague sur laquelle Freud n'a pas hésité un seul instant à surfer, il faut le dire. Au vrai, les tous débuts de la recherche concernant la notion d'inconscient remontent aux intuitions des mystiques antiques, tel que Saint Augustin. Puis la notion d'inconscient s'est précisé grâce aux contributions des grands philosophes allemands de l'époque post-kantienne, tels que Schopenhauer, Carus, Van Hartmann. (Voir la liste des découvreurs de l'Inconscient)

Le développement ultérieur de la notion d'inconscient est dû en majeure partie à Freud. Bien qu'il y ait eu, à la même période, un inconscient "imaginé" par les romantiques qui n'a absolument rien à voir avec l'inconscient freudien, et qui est passé pour autant que nous puissions nous permettre d'en juger, inaperçu. Je reviendrai à cette question dans le prochain petit billet.
Quant à l'inconscient des psychologues, il s'est imposé à peu près au même moment à travers l'œuvre de Pierre Janet, Auguste Forel, Théodore Flournay, Morton Prince ….

Enfin un nouvel inconscient est en train de faire son apparition en prenant une nouvelle forme. Il s'agit de l'inconscient des sciences cognitives, dit l'inconscient cognitif. Cet inconscient englobe le fait de percevoir, d'apprendre et de résoudre des problèmes sans en avoir conscience.

Mais dites-moi, tous ces inconscients pour un seul cerveau, cela ne fait-il pas beaucoup ?

Mais surtout, l'esprit et l'âme* dans tout ce trafic que sont-ils devenus ?
Ont-ils vraiment été étudiés à la lumière de l'expérience humaine, tel que le fit Jung qui propose lui de ne pas dissocier la notion d'esprit de celle de la vie. "L'esprit est le résumé de la nature psychique" nous dit-il. Cela veut dire que ce que nous pouvons raisonnablement connaître de l'esprit passe par le psychique ; ce psychique qui est directement connaissable par la conscience.
Nous verrons aussi que la nature psychique a besoin d'un corps pour s'exprimer notamment en image. Comme le corps a besoin du psychisme pour exercer son activité de vie. Vie et esprit font partie d'un seul état de fait. Jung propose également de regarder l'esprit comme une conscience supérieure. La notion d'esprit, pour Jung implique en effet, que nous lui reconnaissions une supériorité sur le moi conscient. Et c'est cette conscience supérieure que Jung appelle l'inconscient. Plus précisément, il la nomme l'inconscient collectif, en ce sens qu'elle est aussi l'âme supra-individuelle, ou encore un océan d'images et de formes, par opposition à l'inconscient personnel, qui lui est superficiel et relatif.
Jung propose en somme de considérer l'esprit comme une totalité psychique ou matricielle dans laquelle l'unité du conscient et de l'inconscient tend à se former car la psyché est nécessairement de nature spirituelle.
En somme la psychologie de Jung est incontestablement une psychologie de l'âme reposant sur le postulat d'un esprit autonome pris comme un fait réel d'expérience, et non comme une banale sécrétion cérébrale. Partant, le critère de vérité pour toute connaissance de soi cesse d'être dans la dépendance d'un système de calculs aléatoires et normalisés pour venir s'appuyer uniquement sur des perceptions vraies ou tout du moins toujours plausibles (images, connaissance et intuition) en provenance de l'âme. C'est pourquoi, c'est elle, l'âme que tout ami ou médecin de l'humain, devrait aimer et accompagner vers sa délivrance dans un monde difficile parce que trop handicapé par le règne du matérialisme scientifique qui n'en finit plus d'exister.

*L'inconscient physiologique, l'inconscient métaphysique, l'inconscient romantique, l'inconscient psychologique, l'inconscient freudien, l'inconscient cognitif, l'inconscient collectif.
A l'évidence, et je ne suis pas la seule à le penser, l'étude de la conscience a beaucoup moins attiré de chercheurs que l'étude de l'inconscient.
* Souvent d'ailleurs on emploie le mot "esprit" en le confondant avec celui d'âme


à suivre...


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23 mai 2006

Les multiples chemins de la connaissance

Dans mes deux derniers petits billets, j'ai évoqué très obliquement les vastes étendues des domaines couverts par la psychologie universitaire et la psychologie pratique, toutes deux occupant le paysage actuel de la connaissance psychologique de l'homme ; ce découpage ne va pas sans nous rappeler le très connu clivage, psychologie scientifique/psychologie clinique, dont l'approche expérimentale chez la première est proche de la biologie, et chez la seconde de la métaphysique. Je me suis un peu plus attardée sur le cas à part que représente la psychanalyse en ce sens qu'elle est la discipline qui embrasse le mieux les problèmes profonds que soulève l'étude de l'âme humaine. Partant, je ne suis, volontairement, toujours pas entrée dans le vif du sujet concernant la psychologie jungienne qui comme vous le savez m'intéresse à plus d'un titre. La raison en est fort simple : je ne désire pas pénétrer trop vite au cœur même des notions qui fondent la psychologie de Jung pour ne point trop donner à croire à notre imagination vagabonde que nous sommes déjà partis vers notre soi – une personnalité globale et mieux intégrée - alors qu'à la base aucun vrai départ n'a été enregistré. En effet, le grand voyage qui doit normalement conduire au "grand soi" et par là même à la connaissance des grands archétypes commence par la traversée initiale de l'inconscient personnel. L'inconscient personnel contient tous les complexes*, ainsi que l'ensemble des éléments que nous avons refoulés du conscient. En somme, l'inconscient personnel correspond en grande partie à cette figure qui apparaît souvent dans les rêves et que Jung a appelé l'ombre. De plus, nous savons également que l'inconscient personnel reste profondément marqué par la relation intime que nous avons eue avec nos parents. J'ai retrouvé à ce propos dans la préface écrite par Roland Cohen et consacrée au livre de Jung, L'homme à la découverte de son âme – éd Albin Michel -exprimé très clairement ce que je pense sur le sujet :

"Si un jungien doit savoir être aussi freudien et adlérien, c'est d'abord pour éviter des malentendus ; il est des esprits qui en s'emparant de Jung et de son œuvre espèrent retrouver une solution de facilité, dans un sens de couardise, pour ne pas dire de lâcheté. Sauté par exemple directement sur le plan des archétypes en espérant ainsi, grâce à cette espèce de charme et d'onction qui émane des idées éternelles, pouvoir court-circuiter les plans de l'ombre, les plans du marécage qui existent en chacun et qui, plans de l'inconscient personnel, correspondent en bref au plan freudien (l'éternel drame "papas, maman, la bonne et moi" comme le disent les humoristes"), serait la source des plus graves malentendus".
*Complexe : Ensemble idéo-affectifs à fortes charges émotionnelles, les complexes sont des constituants normaux de la psyché


L'histoire des idées psychologiques

La psychanalyse, donc, comme cela a été dit, s'est fixée comme objectif de conduire l'analysant au bien-être par le rétablissement d'un accord harmonieux entre lui-même et la réalité.
William Blake, Origine du mondeJe propose de regarder à présent comment historiquement les savants et les penseurs ont contribué à faire progresser la vision humaine du monde réel. En effet, avec l'apparition de la pensée indépendante des choses extérieures, autrement dit après l'époque de l'union religieuse de l'homme avec la nature, s'est exprimé le besoin typiquement humain de réfléchir et de produire des idées sur le monde. Des idées, notamment, sur la manière dont le monde paraissait concevable : Qu'est-ce-que le monde ? Comment connaître le monde réel ? Quel ordre rechercher ou bien inventer ? Comment connaître le fondement vrai des choses de ce monde ? Ce désir dans l'homme de connaître devenu manifeste de très bonne heure d'abord au moyen d'idées rendues autonomes doit sans doute son existence à la présence dans l'homme d'une dose conséquente de crainte et d'angoisse ; crainte de la souffrance et de la mort, angoisse de devoir vivre dans un monde d'incertitude. Le désir de connaître est né également du goût naturel qu'ont développé les humains pour les choses qui aident à mieux diriger sa vie dans le monde.
Les premières conceptions philosophiques sur le monde conçues comme un tout tombèrent dans la Grèce Antique dés le VIème siècle av Jc. Et donnèrent naissance aux grands systèmes philosophiques qui influencent encore aujourd'hui nos grands systèmes de penser. On a l'habitude, d'ailleurs, pour revenir à la psychologie, de considérer que la philosophie étudie le monde et la psychologie l'âme. La ressemblance entre ces deux disciplines reste, bien entendu, très forte. Puisque les deux tentent de produire différentes opinions sur des thèmes plus ou moins abstraits. Jusqu'au début du XXème siècle d'ailleurs, la psychologie formait une partie de la philosophie. La psychologie depuis revendique haut et fort son autonomie, toutefois, il faut bien garder présent à l'esprit que la plupart des questions d'ordre psychologique que se pose la psychologie contemporaine sont issues des grands débats philosophiques fondateurs.

Les conceptions philosophiques qui ont le plus marqué l'esprit des Occidentaux sont celles de Platon et d'Aristote : le premier, grand philosophe idéaliste, considérait que la vraie réalité résidait dans le monde supérieur des essences, un monde lointain et inaccessible par les sens. Platon imagina un second monde, celui dans lequel nous vivons, qu'il voyait comme secondaire voire illusoire. Ces deux composantes du monde antique, la rationalité - c'est-à-dire le monde sensible qui se manifeste au sens et l'irrationalité - c'est-à-dire le monde latent constitué de vérités issues d'un monde supérieur - n'ont pas perdu de leur fraîcheur puisqu'elles sont en rapport avec les grands sujets en débat qui animent encore aujourd'hui la psychologie contemporaine.

Un peu plus tard, nous verrons que dans l'Occident chrétien et ce jusqu'au XVIe siècle, à l'opposé des conceptions hellénistes qui décrivaient l'existence de deux mondes bien distincts, les penseurs de l'époque chrétienne virent la jonction qu'il existait de manière permanente entre le monde sacré de Dieu et le monde sensible. Les deux mondes communiquaient, selon eux, en permanence ; Dieu était en quelque sorte, pour les théologiens de l'époque médiévale, celui qui pouvait intervenir dans ce monde pour rétablir l'harmonie par exemple.
L'autre point que nous soulignerons est que pour le théologien Saint Augustin, le monde sensible constituait une illusion tant qu'il n'était pas éclairé par la foi.

Quelques siècles plus tard, les rationalistes, tel que Descartes par exemple, vont croire eux en l'existence d'une raison plus ou moins divine ; pour la mentalité rationaliste, si nous voulons connaître la vérité sur le monde nous devons nous référer à la Déesse Raison.
S'ensuivra derrière notamment la venue des idées de Newton (personnage érudit qui a mathématisé l'astronomie) l'affirmation d'une connaissance qui ne peut résulter seulement de l'expérience de la réalité que nous faisons par les sens ; autrement dit c'est dans la perception du monde que nous découvrons des vérités sur le monde, non en nous même – et non plus par l'exercice de la raison, ainsi que l'affirmait Descartes.
Après les idées de Newton, le recours à la quantification et à la mesure devint indispensable pour la saisie du monde réel.

Il est clair que les grandes idées de la psychologie contemporaine sont nées de l'influence qu'ont exercé sur elle, la philosophie, puis la théologie, et plus tard les idées scientifiques.
En fait, le développement des phénomènes psychologiques n'est pas soumis à un ordre linéaire et prévisible ; il varie constamment en fonction de l'histoire culturelle, et surtout tant que l'on s'en tient à une psychologie "idéologique", il est soumis aux idées collectives dominantes du moment. Par exemple si nous nous référons au domaine d'exploration privilégié actuel, qui est celui de la psychologie cognitive - psychologie qui a le vent en poupe - où le sujet humain est pensé à l'image d'un ordinateur, comme un système de traitement de l'information ; le lien évident qui existe entre les idées du modèle cognitif privilégié et le développement actuel des nouvelles technologies de communication saute ici aux yeux.

Mais comme je ne veux pas m'éterniser sur la très longue liste qui vous fatiguerait vite d'idées psychologiques prises au piège du contexte socioculturel, mon exposé sur le développement de la psychologie idéologique se bornera à vous communiquer le bref aperçu historique dont je viens de vous brosser un grand tableau en quelques lignes à l'instant. La psychologie analytique de Jung offre, selon moi à la connaissance du monde et de l'homme, des descriptions beaucoup plus inclusives, et profondes, et qui tiennent compte surtout d'un principe spirituel tout aussi inaccessible et énigmatique, du reste, que celui qui constitue la matière. C'est pourquoi je m'intéresserais bientôt uniquement à cette psychologie mais seulement après avoir tracé dans le prochain petit billet, l'histoire de la découverte de l'inconscient personnel inauguré par Freud.


L'animisme :

Connaître par l'ordre subjectif

"L'homme archaïque se contente de faire, seul l'homme civilisé sait ce qu'il fait".

Arborigènes mimant leur totemCette phrase de Jung résume bien la différence majeure du type de démarche psychologique qui peut s'observer entre l'homme dit primitif et nous, l'homme pensant.
L'homme primitif n'a, certes, pas atteint notre degré de différenciation psychique. Il s'est développé en quelque sorte, à l'envers de nous ; sa pensée et toute sa sensibilité lui sont quasiment inconscientes, vu qu'il n'a pas opéré de séparation entre le psychique subjectif (sa psyché, et sa vie mentale) et l'objectif naturel (tous les objets matériels en dehors de lui). Voilà pourquoi, l'homme archaïque ne distingue pas non plus son monde intérieur du monde extérieur.
L'animisme est le terme technique qui désigne la croyance aux âmes et aux esprits. Si L'homme archaïque voit des âmes et des esprits partout, c'est parce qu'en fait, , il projette sa propre activité mentale inconsciente, donc, sur les objets du monde ; les deux n'étant pas séparé, comme je le disais. Sa vie psychique apparaît en quelque sorte dissimulée au-dehors ou autrement dit dans tous les objets matériels ; les animaux, les arbres, les plantes, les montagnes. Quand une fraction essentielle de son âme est projetée sur une personne, on dit que cette personne acquiert une efficacité extraordinaire, on l'appelle également une personnalité mana*, et elle devient, soit Lou garou, soit sorcier, soit magicien, c'est-à-dire quelqu'un doué de force magique ; cela, parce qu'elle renferme une part essentielle de la vitalité psychique de celui qui projette. La projection de la psyché sur les objets, les choses et les personnes par les hommes primitifs, Lucien Lévy-Bruhl l'a appelée la participation mystique.
Ce que peu de personnes savent et reconnaissent, c'est que la projection psychologique des primitifs est un phénomène ordinaire, s'exprimant même chez l'homme rationnel ; simplement, en général nous ne croyons pas que cela puisse véritablement nous concerner.
Revenons à notre aperçu historique ; la conception primitive permet de voir que l'homme qui vivait dans la matrice de la nature se contentait, en fait, de l'interroger pour connaître, mais qu'en fait c'est lui-même et tout particulièrement son intérieur qui produisait les réponses. C'est pourquoi aussi l'homme primitif reste en grande partie dominé par ses peurs et ses angoisses intérieures. De sorte que nous pouvons dire que la différenciation psychique représente une avancée formidable et indispensable pour le bien-être de l'esprit humain.

* le mana correspond à l'énergie qui agit et qui produit des effets extraordinaires, ou magiques. On parlera de personnalités mana.


Le platonisisme et l'aristotinisme grec :

Connaître par l'ordre spirituel ou par l'ordre physique ?

Platon&AristotePlaton et Aristote sont deux figures importantes de l'Antiquité qui illustrent des tendances opposées dans leur conception de la vérité. Le premier était tourné vers le ciel, l'autre vers la terre. Comme cela se dit souvent, nous sommes, en fait, leurs enfants : "leur empreinte est visible dans nos manières de penser, de classer, de conduire un débat".

Platon, le célèbre philosophe idéaliste imagine un monde séparé qui correspond à sa théorie des deux mondes. Pour Platon, le premier est le monde sensible, monde dans lequel nous vivons et qui renferme toute la nature que nous voyons, tous les corps, toute la matière. Ce monde embrasse l'ensemble du domaine visible. Mais aux yeux de Platon, cet univers est illusoire, passager, secondaire. Ce n'est que le second monde - c'est-à-dire celui du domaine invisible- qu'il nomme le monde intelligible ou de essences et qui détermine et dicte ce que doivent devenir les formes matérielles passagères et illusoires. Le monde intelligible est aussi appelé le monde des idées - voire la théorie des Idées de Platon - Le vrai monde pour l'univers platonicien ressemble à un cosmos, à une harmonie naturelle où se tient le bien, le vrai et le beau ;
Chez Platon, les Idées représentent en somme la forme la plus élevée de la connaissance véritable. Seule l'âme les connaît, car elle a séjourné dans le monde intelligible au cours d'une existence antérieure. Mais elle les a oubliées en ré- entrant dans le corps physique.
La "dialectique" de Platon est précisément une technique fondée sur le dialogue qui permet de mettre en lumière les Idées qui sont restées longtemps plongées dans l'obscurité, autrement dit dans l'âme.

Aristote, à l'inverse des conceptions idéalistes de Platon, est un philosophe grec réaliste qui a été vingt et un an durant, le disciple de Platon. Il fut aussi son adversaire le plus critique et le plus redoutable ! Rien de plus normal, Aristote incarne le pôle intellectuel opposé à celui de Platon. Les deux signent, en fait, le clivage théoricien contre pragmaticien. En effet, si Platon, le philosophe toujours en quête de perfection divine, invente une figure du bien si haute et si lumineuse qu'on ne peut la décrire, Aristote ventera lui le bien humain qui est "activité de l'âme" sur cette terre. Aristote va s'appliquer en fait, à trouver en ce monde, "l'universel, dans ses régularités et ses lois", d'où son esprit organisateur et classificateur qu'on lui connaît ; il se livre avec soin à la recherche d'un dieu caché dans la matière, un dieu des formes qui modèle éternellement la matière. Car pour Aristote, l'âme correspond à la forme, c'est-à-dire à ce qui doit devenir. L'âme et le corps deviennent complémentaires selon ses vues, puisque l'âme se voit dans la forme du corps. Pour Aristote, chaque objet individuel, doit se conformer à sa forme, autrement dit à son destin, à son avenir dicté par la matière. Le déploiement de l'essence -ou l'âme- dans la matière, Aristote le nomme l'entéléchie, ou réalité complète – mot qui vient du grectélos qui veut dire, but, ou ce qui est réalisé-
En somme, la métaphysique d'Aristote nous dit que le bien souverain n'est pas à rechercher dans une quelconque région transcendantale du monde qu'aurait imaginé Platon, mais qu'elle naît plutôt du "seul contact entre les hommes libres".


L'époque préchrétienne et médiévale :

Connaître par la foi et la croyance

L'autre berceau au sein duquel vont naître les problématiques et débats constitutifs de la psychologie est celui de la théologie médiévale.
La création Adam et Eve chassés du paradie ChantillyMais pour pouvoir satisfaire l'exigence de clarté que réclame ce passage de l'histoire, nous nous devons de remonter à la source des évènements qui ont provoqué l'installation du christianisme comme religion d'État et ce jusqu'au haut Moyen âge au moins. À strictement parler, la théologie préchrétienne a vu le jour au début de notre ère au moment où le monde sortait d'une très grande décomposition morale. Cette période correspond à la ruine du monde antique* et dura du IIIe siècle jusqu'au IVème. En grande partie, la déchéance de l'empire antique fut causée par l'arrivée du christianisme qui fut reconnu comme religion d'état pendant le règne de l'empereur romain Théodose 1er le Grand (379-395). Le monde occidental est passé du paganisme - religion aux mœurs libres et relâchées et toute imprégnée de mythologie au christianisme, - religion soumise à un ascétisme strict et très sévère - ; nous retrouvons là, sans doute, la marque d'un saut spirituel important. Pourtant nombreux sont ceux qui se demandent encore aujourd'hui comment ce basculement a-t-il pu se produire ? Nous savons seulement que le passage de la religion des Grecs et des Romains, à l'avènement de la Grande Eglise s'est fait sous fond de désordre et de crise sociale et psychologique très graves. Quels en furent les principaux facteurs déclencheurs ? Sans doute furent responsables : l'invasion des cultes orientaux qui grandissaient dangereusement ; les rites des religions à mystères qui devenaient de plus en plus populaires et risquaient de déstabiliser à tout moment la religion traditionnelle romaine en place. Les Mystères d'Isis et de Mithra, le culte de Sol invictus et le monothéisme solaire, rendirent, eux aussi, la compétition difficile dans l'instauration du christianisme. La persécution des chrétiens par les Romains faisait rage aussi à cette époque de grandes perturbations, du même coup, les chrétiens devinrent un peuple martyr. L'état d'attente d'un désastre immanent dans lequel se trouvait la population a dû également beaucoup jouer; sans compter que les hérésies et les gnoses tentaient elles aussi de s'imposer malgré les fortes tensions psychologiques qui régnaient dans le monde à cette époque. En quelque sorte, le christianisme profita de cette période de grand désordre et d'instabilité pour s'infiltrer peu à peu partout dans l'empire et dans toutes les couches sociales.
En dernière analyse, nous pouvons dire comme Hegel, que la disparation de la religion antique causée par l'avènement du christianisme eut lieu par refoulement de la religion païenne.
Dans le même temps, le changement de révérenciel religieux, créa un début de distanciation notable avec le monde, ce que Jung a nommé l'éloignement chrétien du monde avec lutte contre le monde sensible, je le cite :

par un travail séculaire d'éducation, le christianisme a refréné l'impulsivité animale de l'Antiquité ainsi que celle des siècles barbares ultérieurs, au point qu'une énorme masse de forces instinctives put se libérer pour construire une civilisation. L'effet de cette éducation se manifeste d'abord en un changement fondamental d'attitude, c'est-à-dire l'éloignement du monde et la recherche de l'au-delà caractéristique des premiers siècles chrétiens.


Au regard de notre analyse en cours sur l'origine des idées psychologiques, nous pouvons dire que c'est grâce à cette distanciation prise par rapport au monde des sens et des plaisirs instaurés par le christianisme que le développement plus tard de l'esprit scientifique devint possible.

Comment apparaît le monde aux yeux des penseurs et savants de l'époque médiévale ?
La source de toute connaissance réside dans l'Evangiles. Le monde a été créé par dieu, il n'est plus éternel comme le pensait Aristote. Pour connaître, il faut posséder Dieu en soi. Dans la théologie chrétienne, Dieu est complètement incarné dans un être vivant, Jésus. Il s'est substantifié, il est devenu logos. On assiste de fait au retour du sacré ou du divin dans le monde des objets. La pensée religieuse et l'ascétisme envahissent à peu près tous les milieux de sorte qu'au moment du triomphe de la Grande Eglise, l'homme ne pense presque plus, il se contente de croire et d'aimer Dieu.

On distingue deux grands systèmes de pensée au moyen-âge : celui de Saint Augustin et celui de Saint Thomas d'Aquin :

Saint Augustin
Le très grand mystique chrétien et écrivain de génie, Saint Augustin (353-430), fut le témoin de l'affirmation du christianisme, seule foi autorisée au VIème siècle de notre ère. Cet homme remarquablement épris de Dieu n'a pas tant cherché à prouver l'existence de Dieu, qu'à poser le problème de la foi : "don de Dieu qui doit être nourrie, soutenue par l'exercice, d'une raison humaine".
Saint Augustin""Il faut comprendre pour croire", affirmait-il. La foi cherche dieu, mais c'est l'intelligence qui le trouve. Intelligence qui le trouve dans les vérités éternelles.
Le but de l'intelligence de Dieu, pour Saint Augustin, était moins la science que la sagesse laquelle possède à la fois un aspect affectif et une dimension de contemplation. Pour autant, la connaissance de Dieu par la méthode d'approche augustinienne n'enlève rien au mystère de Dieu. Ce mystère transparaît par exemple au travers de l'existence de trois personnes en Dieu. À travers toutes la création, par exemple, nous retrouvons aussi la trace d'un rythme ternaire : "mesure, nombre, poids ; unité, forme, ordre ; être, forme, subsistance ; physique, logique, éthique ; naturel, rationnel, moral". Mais cette structure se révèle dans l'homme surtout : "Esprit, connaissance, amour ; mémoire, intelligence, volonté ; mémoire de Dieu, intelligence, amour".
Pour l'augustinisme enfin, "le monde existe sur un mode sacré. La source de toute connaissance se trouve dans les textes sacrés, et les rapports entre le monde sensible et le monde religieux ou sacré s'effectuent par le Christ qui condense en lui un double nature - sacrée et profane" -
Cette idée d'intermédiaire entre monde profane et monde sacré se retrouve dans les structures médiatrices qu'examine la psychologie contemporaine entre le sensible et l'abstrait, entre sensation et connaissance.

Saint Thomas d'Aquin
cours de philosophie à la faculté des arts au Moyen âgeAu XIIIe siècle, avec le développement économique, les thèses religieuses deviennent insuffisantes, le développement des universités échappe de plus en plus aux contrôles des évêques ; les arts libéraux ou païens – c'est-à-dire la logique, la grammaire et l'arithmétique tendent à se développer. On nomme cette époque la période préscolastique. Deux vérités cherchent à s'imposer : la raison humaine et la foi chrétienne notamment sur le thème de la création. Les philosophes qui ont lu Aristote soutiennent l'éternité du monde, les religieux attestent, eux, que le monde a eu un commencement. Seul, Thomas d'Aquin ne voit "aucune impossibilité logique à tenir que le monde fut à la fois créé et éternel". Dieu aurait pu créer un monde éternel. Thomas d'Aquin réalise une synthèse entre les textes sacrés et ceux d'Aristote. Pour lui, si la raison est divine, elle ne peut contredire les dogmes de la révélation. Par le raisonnement, nous pouvons accéder aux substances secondes - c'est-à-dire aux Universaux - pense-t-il. Par opposition aux substances premières qui sont les choses perçues par les sens : les formes, les objets individuels…Cette vision est nommée réalisme, et elle ouvrira sur la grande querelle des Universaux du XIème siècle.
Ce qui ressort des thèses de Saint Thomas d'Aquin, c'est l'idée que la nature est ordre (qui est nommé le fixisme) et qu'on y accède par l'exercice de l'intellect. L'idée d'un ordre immuable et fixe de la nature ne manquera pas bien sûr de faire école, et on la vit notamment se répandre au moment de la naissance des sciences physiques.


*La fin historique du paganisme ne peut être mieux illustrée par l'incendie du sanctuaire d'Eleusis, en 396 par Alaric, le roi des Goths. À cause de cette profanation, le rituel initiatique disparaîtra pour toujours.

L'époque de la renaissance

Connaître de l'intérieur

Avec Thomas d'Aquin, l'autonomie de la raison avait largement commencé. Au XV et XVIIe siècle, l'essor philosophique et scientifique s'accentue. La science doit devenir recherche de connaissances utiles et servir de plus en plus l'essor économique de l'Occident. Un grand bouleversement religieux va marquer cette époque : la réforme luthérienne.
Luther, moine augustin, né en 1483, a une révélation ; il acquiert la conviction que l'homme n'est pas sauvé et promis au Paradis grâce à ses œuvres sur terre, mais "qu'il n'est justifié, et sauvé, que par la foi". Cette affirmation constitue une véritable révolution théologique ; la vérité est à l'intérieur de chacun et c'est par un retournement sur soi, c'est-à-dire "dans la solitude mais librement" qu'on y accède. Sur le plan théologique, Luther rend le chrétien maître de lui-même.
Pour la psychologie, la réforme luthérienne aura un impact décisif puisqu'elle emmènera la séparation entre l'homme intérieur –l'homme libre - et l'homme extérieur, celui dont les actes et le comportement sont soumis à un pouvoir et à un contrôle externe.

Connaître par le cogito cartésien

Blake - mélancolie - Pour Descartes (1596 – 1650), seul l'exercice de la raison est un moyen de connaissance. Plus nous pensons et plus nous avons des chances d'accéder aux vérités universelles qui sont constituées d'idées innées, dites "connaissance facile, communes, et immédiates". Il oppose notamment les représentations et la raison. Les représentations correspondent aux qualités premières du corps. La perception sensible qualitative et non fiable en fait partie : l'odorat, la couleur, le goût entre autre.
La raison, elle, relève de la perception mathématique quantitative et correspond, selon Descartes à la vraie connaissance intellectuelle. Selon l'exigence de Descartes, il n'y a que ce qui est clair et évident –autrement dit obtenue grâce à une inhibition radicale de toute émotion - qui puisse être vrai. "Seul ce qui est saisi logiquement et rationnellement peut être vrai ; l'entendement est donc par là l'unique garant de la vérité" .
Pour Descartes, la raison ou l'entendement, est l'outil donné par Dieu ; pour le connaître, il faut faire fonctionner la pensée, d'où la méthode cartésienne de l'exercice de la raison, qui démarre par le doute.
Du même coup, le dualisme cartésien permis d'engendrer une désacralisation du corps humain. Puisque la pensée par la raison qui est le propre de la substance spirituelle est caractéristique de l'homme ; l'animal, lui en est dépourvu. Tout ce qui constitue un corps peut être à présent considéré comme une machine. L'animal comme le corps de l'homme est mu selon le mode de l'action "réflexe" pour Descartes. (Les esprits animaux notamment se reflétaient dans le cerveau, dans la glande pinéale ; c'est elle qui animait les muscles). Cette affirmation avait l'avantage de permettre la vivisection des animaux expérimentaux. Elle permit également de revoir l'idée que l'on se faisait à l'époque des fous. Après Descartes, par exemple, le corps ne pouvait plus être pensé posséder par le démon. "La folie s'installe quand le doute ne s'exerce plus, la folie est déraison, atteinte de l'ordre rationnel".


L'homme des lumières

Connaître par la perception

Dieu créateurDans l'histoire des idées, le siècle des lumières (le XVIIIe siècle) fait référence en premier lieu, à "une sorte d'idéal universel offert à tous". En effet, pendant le règne de la pensée religieuse, ceux qui ne bénéficiaient pas du salut, parce qu'ils ne croyaient pas en Dieu, étaient exclus du système social. C'est pour pallier à l'intolérance et à l'exclusion systématique que les Lumières ont vu le jour. De plus, dès que le paradigme de Newton devint célèbre, toutes références aux spéculations coupées du réel furent écartées et rejetées.
Connaître pour l'homme des lumières, c'est observer et mesurer. Le goût de l'expérimentation maintenant tous les sens en éveil, notamment celui de l'observation (la vue) s'accentua considérablement. Cela sans doute beaucoup pour compenser la position radicale et unique qu'avait tenue Descartes en matière de connaissance, en ce sens que pour ce dernier, la conscience (pensée ou esprit) claire était une conscience partielle, autrement dit amputée de la complexité des émotions ainsi que des perceptions par les différents corps sensibles.


J. Locke (1632-1704)
Le philosophe anglais proposera des thèses opposées à l'innéisme de Descartes.
Pour cet homme du début des lumières, les idées naissent à l'intérieur suite aux perceptions du monde. Autrement dit c'est dans la perception du monde que nous découvrons des vérités sur le monde et non en nous-même. Avec Locke, la théorie de la connaissance empirique se développe. Les puissances internes de l'esprit – la mémoire, l'attention ainsi que la volonté se mettent à jouer un rôle important dans l'acquisition des connaissances. Locke, en fait, ne se soucie pas de connaître la nature même de l'esprit, il préfère en observer les manifestations.

Les philosophes empiristes par suite vont susciter l'envie de s'intéresser davantage au poids décisif de l'éducation des enfants. Si celle-ci est bien réalisée, l'éducation formera un entendement bien fait. Avec Locke, la raison cesse d'être innée, mais elle devient une spécificité de l'homme.


L'homme romantique

Connaître par la défense de l'irrationnel

Waterfull Stefan WeissL'homme romantique (≈ 1760 – 1830) est né à la suite du trop plein de l'intellectualité que fit naître la pensée cartésienne, et que certains trouvèrent même beaucoup trop sèches. L'homme romantique c'est celui qui préfère privilégier l'imagination, les sentiments de l'amour, la sensibilité parfois morbide notamment dans la littérature. Citons les romantiques les plus connus : Goethe, Rousseau, Sade, Blake, Shakespeare, Michelet, Hugo, Berlioz, Novalis et Kleist, Coleridge et Shelley
Pour les romantiques, la conviction que la voie du salut est dans l'amour est ressentie très fortement. "L'amour peut quelquefois donner toutes les vertus que la religion et la morale prescrivent". Tel est ce qu'ils pensent.
L'essence même de l'homme romantique est de refuser les limites. Le désir de toucher chaque individu dans ce qu'il a de plus personnel s'exprime très fortement chez les écrivains romantiques : "sa capacité de sentir, de se souvenir, de souffrir, de s'élancer vers le divin ou vers l'infini, et de forger un style et une technique bien à lui" n'a pas d'égal.
N'oublions pas enfin, de souligner sa grande passion pour la nature. Pensons notamment à Rousseau…
La pensée romantique considère que la vérité exacte s'obtient par l'absence d'idées, l'absence de raison qui fait basculer dans l'irréel.
Les romantiques contestent donc, en priorité la raison, et affirment l'existence "de forces puissantes" inaccessibles à la connaissance sensible. Le sentiment, l'intuition et le ressenti, deviennent pour l'homme romantique source de toute vérité. Toute chose peut devenir ainsi un message de Dieu qu'il faut interpréter.
Pour la psychologie, le romantisme a pesé par sa défense de l'irrationnel, fonction, d'ailleurs, très largement étudié par Jung.


L'homme positif

Connaître par la science

L'époque du positivisme (1830-1840) correspond avant tout à une profusion de découvertes scientifiques et de savants. La science est conçue ici, comme une nouvelle religion.
Auguste ComteAuguste Comte sera choisi en 1837 pour définir le programme des modalités qui permettra de reconnaître ce qu'est la scientificité d'une chose. Il dénombre 6 sciences fondamentales : les mathématiques, la physique, l'astronomie, la chimie, la biologie, la sociologie.
Même si depuis le siècle des Lumières, l'homme n'est plus soumis à un ordre transcendantal ou divin qui le domine, Comte refusera au départ d'accorder le statut de science à la psychologie. Prétextant qu'une science de la nature humaine est impossible. Selon lui la nature humaine ne peut être appréhendée que par des discours métaphysiciens ou spéculatifs. De plus, la psychologie a recours à l'auto-observation, méthode que Comte récuse d'emblée.
Auguste Comte enfin reproche à notre toute jeune psychologie en lice dans la course vers l'attribution du titre de science positive, de toujours "subordonnées les fonctions affectives aux fonctions intellectuelles".
Toutefois Comte consentira à donner le titre de psychologie positive à la partie de la discipline que certains appellent la craniologie, d'autre la phrénologie ; laquelle est l'art de connaître les instincts, les penchants, et les dispositions morales et intellectuelles des hommes par l'étude de la configuration de leur cerveau et de leur tête. Il s'agit là d'une psychologie ni empiriste, et ni idéologique, mais "d'une psychologie constituée de faits et qui sera d'abord physiologique".

Concluons
Nous venons de voir que la route des idées psychologiques est jonchée d'étapes plus ou moins heureuses et houleuses, de rêves et d'idéologies plus ou moins brisés. Depuis l'avènement de la pensée moderne et scientifique, l'emprise de la pensée unique de la religion sur les idées se relâche. Et la quête du bonheur individuel s'est substituée en catimini à celle du salut. Le dogme de la parole divine s'est écroulé, mais je pense que nous devons toujours rester très prudents car la montée d'une éventuelle pensée contenant une idéologie qui fixe trop l'esprit dans une attitude unique est très vite arrivé.
N'en sommes-nous pas arrivés là d'ailleurs avec le règne de la pensée matérialiste en Occident ?
La connaissance réclame une ouverture et une diversité de penser infinies. Or ainsi qu'aimait à le dire Jung, "le fini ne saisira jamais l'infini". Alors, nous, sujets humains et organismes finis, restons humbles et toujours très tolérants au contact de tous les genres d'attitudes et modes de connaissance qui peuvent être pris en face du monde.
J'ai juste un petit bémol à formuler, au regard de l'état actuel de la psychologie. N'est-ce pas regrettable, tout de même, de constater que l'esprit humain est de nos jours regardé scientifiquement, à cause de l'influence des idées matérialistes et mécanistes du XIXe, dans une dépendance totale à la matière ? Seule la recherche de tel ou tel substrat biologique ou chimique expliquant tel ou tel fonctionnement de l'esprit intéresse les recherches scientifiques actuelles ; n'est-ce pas un peu dommage, et surtout très exclusif comme attitude ? Cela frise un peu trop la recherche unique ! La plupart des philosophes et des scientifiques intelligents se sont mis au début du XIXe à porter l'ordre physique et biologique au pinacle. Or comme le disait Jung, est-ce que la matière n'est pas autant une inconnue que l'esprit ? Voilà bien une question que la sphère bien gardée des chercheurs scientifiques en psychologie ne se prive pas d'éluder.




à suivre...

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17 avril 2006

C.G.Jung et l'Astrologie


L'astrologue mathématicien étudiant les lois du zodiaque

Voici quelques courts extraits de textes et de lettres piochés dans l'œuvre écrite de Jung et qui témoignent de l'idée que ce dernier se faisait de l'astrologie.
Les textes sont tirés du livre de C.G.Jung, "L'homme à la découverte de son âme" Albin Michel. Et les lettres des tomes II & V " C.G.Jung Correspondance" Albin Michel.








Ptolémée, table astronomiques VIII-IXème
Au Docteur B.Baur
(Zurich)



le 29 septembre 1934





Monsieur le Docteur,



Merci beaucoup pour les aimables démonstrations. En ce qui concerne l'argument de la précession*, ce n'est pas une objection contre la validité de l'astrologie, mais contre la théorie primitive affirmant que les astres eux-mêmes diffusent certains effets. L'argument de la précession dit, comme on le sait, qu'un homme [de notre temps] né dans le degré 1 du bélier (donc quand un degré du Bélier a, comme on dit, franchi l'horizon à l'est) n'est nullement né à cette date, mais au contraire dans le degré 2 des Poissons. Les forces secrètes du soleil sont dans le degré 1 du Bélier, la lune par exemple dans le degré 7 du Cancer, Vénus, Jupiter, dans des positons analogues ; elles ne sont donc pas en harmonie sur le plan astronomique et ne peuvent de ce fait pas venir de ces positions seulement apparentes et fixées arbitrairement. Aussi Choisnard* écrit-il très justement que : "Le Bélier reste toujours dans la 12e partie du zodiaque etc.", à l'évidence il entend par là que le soleil dans le Bélier n'est pas un énoncé astrologique, mais une indication temporelle. C'est le printemps qui recèle les forces agissantes, sans souci de savoir dans quel signe du zodiaque le soleil se trouve réellement. Dans quelques millénaires, lorsque nous dirons Bélier, le soleil se trouvera en réalité dans le signe du Capricorne, donc en plein hiver, sans que le printemps ait perdu de ses forces.
Le fait que l'astrologie donne pourtant des résultats valables prouve donc que ce ne sont pas les propositions apparentes des astres qui agissent, mais les temps qui ont été mesurés ou déterminés par des positions astrales auxquelles on donne des dénominations arbitraires. Le temps s'avère ainsi être un fleuve d'évènements rempli de qualités et non comme le voudrait notre philosophie, une conception ou une condition de notre entendement abstraite en soi.
La validité des résultats de l'oracle du I Ching* fait ressortir le même fait étrange. L'exploration soignée de l'inconscient montre une étrange coïncidence avec le temps, ce qui explique d'ailleurs que les Anciens aient pu projeter la succession de contenu perçus inconsciemment et intérieurement dans les cadres extérieurs temporels de nature astronomique. Ce fait est à la base des liens existant entre les évènements spirituels et les cadres temporels. Il ne s'agit donc pas par exemple de liens indirects comme vous le supposez, mais de liens directs. Conjonctions, oppositions, etc. ne sont vraiment pas influencés par le fait qu'arbitrairement nous appelons degré 1 du Bélier ce qui est degré 2 des Poissons.

Meilleures salutations,



Votre dévoué
[C.G.Jung]


*Le point de l'écliptique (orbite solaire apparente) où se trouve le soleil au moment de l'équinoxe, le 21 mars (degré 0 du Bélier), est appelé point vernal (ou point gamma). Par suite du mouvement gyroscopique de l'axe de la terre, le point vernal se déplace sur l'écliptique dans le sens des aiguilles d'une montre. C'est ce que l'on nomme sa précession. Ce phénomène fut découvert au 2è siècle avant J-C, par l'astronome grec Hipparque de Samos. Une révolutionne complète du point vernal le long des douze constellations que compte l'astronome derrière l'écliptique, dure environ 25 000 ans sur la toile de fond d'une constellation différente (un "mois platonicien"). Pendant les 2 000 derrières années, on pouvait voir la constellation des Poissons derrière le point vernal. Maintenant il s'approche du Verseau. Dans l'astrologie occidentale, la précession du point vernal n'est pas prise en considération, au contraire même, dans les horoscopes actuels le point vernal est toujours placé dans le degré 0 du Bélier. C'est ce qui constitue le principal argument contre l'astrologie.
*Paul Flambart (Paul Choisnard) Preuves et Bases de l'Astrologie scientifique, 2è édition, Paris 1921, p.162:"… aujourd'hui comme dans l'antiquité on peut appeler Bélier la douzième partie du zodiaque que traverse le soleil aussitôt après l'équinoxe de printemps…".
* Traduit du chinois en allemand et expliqué par Richard Wilhelm, Iéna 1923, 2 volumes. Il s'agit d'un livre de sagesse et de prophéties dont les origines remontent à l'antiquité mythique.







Ptolémée projette les coordonnées terrestres, William Blake
Question adressée à Jung : "Si, comme vous le prétendez, notre psyché se trouve projetée dans les choses, qu'elle anime de ses propres données inconscientes, comment se fait-il que l'astrologie et les autres "sciences occultes" présentent de l'intérêt aux yeux de l'homme réputé conscient ?"

Réponse de Jung : L'astrologie a une grande importance et je suis loin de la sous-estimer. Cela ne veut pas dire qu'il faille supposer que les constellations éternelles soient responsables des caractères de chacun et de leurs particularités. Les constellations nous servent essentiellement à préciser notre position dans l'espace et à mesurer le temps. Mais ne soyons pas comme ce célèbre dilettante de l'astronomie qui l'admirait aveuglément en ce qu'elle permettait de fixer le poids, la composition chimique des étoiles et surtout de découvrir leurs noms ! Elles ne portent pas des noms qu'elles possèdent à priori, mais bien ceux que nous leur avons données et qui servent en partie de repères dans le temps; c'est là que commence le grand problème de l'astrologie. Comment se fait-il qu'une époque, qu'une période donnée possède certaines qualités qui se reflètent dans les choses et les êtres qui les ont traversées ou qui y ont pris naissance, qualités qui permettent aussi de conclure en retour à l'époque où ces choses ont été engendrées ? Ce problème paraît d'un point de vue philosophique être extrêmement compliqué, alors que dans la pratique il est fort simple ; j'ai par exemple chez moi une vieille armoire dont un connaisseur compétent me dirait qu'elle a été faite vers 1720 à tel ou tel endroit, par tel ou tel maître. Comment le sait-il ? C'est là la science du bon antiquaire ! De même un fin connaisseur en vin pourra préciser l'année, le cru et la cave de tel ou tel échantillon. Il sait que le vin de telle année et de tel coteau, en raison des conditions particulières qui régnèrent alors, a acquis une saveur qui le distingue des vins que ces mêmes vignes livrèrent les autres années. Il en va de même des hommes ; nous sommes nés à un moment donné, en un lieu donné, et nous avons, comme les crus célèbres, les qualités de l'an et de la saison qui nous ont vus naître. L'astrologie n'en prétend pas davantage.







Ptolémée, table astronomiques VIII-IXème
To Pr.B.V.Raman*
Bangalore/India


6 septembre 1947


Dear Pr.Ramn,


Je n'ai pas encore reçu l'Astrological Magazine, mais je veux quand même répondre tout de suite à votre lettre.
Vous voudriez savoir ce que je pense de l'astrologie ; il y a plus de trente ans que je m'intéresse à cette préoccupation de l'esprit humain. Ce qui m'intéresse avant tout en tant que psychologue, c'est la question de savoir comment la complication de certains caractères peut-être élucidée au moyen de l'horoscope. Dans les cas de diagnostic psychologique difficiles, je fais la plupart du temps dresser un horoscope pour disposer d'un point de vue, nouveau. Dans beaucoup de cas les indications de l'astrologie contenaient une explication pour certains faits que je n'aurais pas compris sans elle. D'une telle expérience j'ai tiré la conclusion que l'astrologie présentait un intérêt tout particulier pour le psychologue. Elle est fondée sur un fait psychologique d'expérience que nous appelons "projection" – c'est-à-dire que ce que nous trouvons dans les constellations astrales, ce sont en quelque sorte des contenus de l'âme. A l'origine il en est résulté l'idée que ces contenus provenaient des astres, alors qu'ils n'ont avec eux, en fait, qu'une relation de synchronicité*;
Je conviens que c'est très singulier, et que cela jette une lumière étrange sur la structure de l'esprit humain.
Ce que je regrette dans la littérature astrologique, c'est surtout l'absence d'une méthode statistique par laquelle certains faits fondamentaux pourraient recevoir une base scientifique.
J'espère que ma lettre à répondu à votre question.


Yours sincerely
[C.G.Jung]


* L'en-tête de sa lettre est ainsi libellé :"Kaman Publicaitons, Proprietor B.V.Raman ; The Astrological Magazine (India's Leading Cultural Monthly)."
* Par la suite, Jung a modifié par deux fois ce point de vue. Cf. lettres à A.Jaffé, 8 septembre 1951, n 2 et à Bender, 10 avril 1958.






le zodiaque, XVIème
15 novembre 1958
To Robert L.Kroon







L'astrologie est une de ces méthodes intuitives comme le Yi-King, la géomancie et autres procédés de divination. Elle est fondée sur le principe de synchronicité, c'est-à-dire sur des coïncidences significatives. J'ai exploré expérimentalement trois de ces méthodes intuitives ; celle du Yi King, la géomancie et l'astrologie.
L'astrologie est une psychologie naïvement projetée dans laquelle les attitudes et les tempéraments humains sont représentés par des dieux et identifiés à des planètes ou à des constellations du zodiaque. Lorsque je travaillais sur l'astrologie, j'ai eu plus d'une fois l'occasion de l'appliquer à des cas particuliers.
On constate de remarquables coïncidences, par exemple la position de Mars au zénith dans le fameux horoscope de Guillaume II, qu'on a appelé le "Friedenskaiser". Déjà dans un traité médiéval il est dit que cette position signifie toujours un casus ab alto, un cas qui vient du haut.
Une telle expérience est très impressionnante pour un esprit versatile, peu sûre lorsqu'elle est aux mains de quelqu'un sans imagination, et dangereuse dans celles d'un fou, comme c'est le cas pour toutes ces méthodes intuitives. Si on s'en sert intelligemment, elle peut être utile lorsqu'on a affaire à une structure particulièrement opaque. Elle permet souvent des intuitions surprenantes. Sa limite la plus sûre est constituée par le manque d'intelligence et d'ouverture d'esprit de l'observateur. Elle constitue un intelligent aperçu comme peuvent l'être les lignes de la main ou l'expression du visage – toutes choses dont un esprit stupide et sans imagination ne peut rien faire et à partir desquelles un esprit superstitieux tire les pires conclusions.
La vérification statistique des "vérités" astrologique est discutable et même improbable. (CF mon article "Synchronicity" ; an acausal connecting principle", in Jung-Pauli, The interprétation of nature and the Psyche, Bollingen Series, vol LI, New York, 1952 p83sq.).
Leur utilisation superstitieuse (qu'il s'agisse de la prédication de l'avenir ou de l'établissement de certains faits à travers les possibilités psychologique) est fallacieuse.
L'astrologie diffère beaucoup de l'alchimie dans la mesure où la littérature historique en la matière consiste simplement en l'exposé des différentes méthodes qu'on peut utiliser pour monter un horoscope et pour l'interpréter, et non en textes philosophiques, comme c'est le cas pour l'alchimie.
Il n'existe pas encore de présentation psychologique de l'astrologie, compte tenu du fait qu'on ne dispose pas à ce propos du fondement empirique nécessaire à la démarche scientifique. Et la raison en est que l'astrologie n'obéit pas au principe de causalité, mais relève, comme toutes méthodes intuitives, de l'acausalité. Il n'est pas douteux que l'astrologie est aujourd'hui plus florissante qu'elle l'a jamais été dans le passé, mais en dépit de son usage de plus en plus fréquent, elle n'est encore explorée que de façon très insatisfaisante. Elle ne constitue un instrument heureux que si on s'en sert intelligemment. Elle n'est pas du tout à toute épreuve et, si c'est un esprit rationaliste et borné qui s'en sert, elle s'avère franchement nuisible.



Yours cordially,
[C.G.Jung]









Extrait de la lettre adressée au Docteur Michael Fordham – le 18 juin 1954 –

Critiques majeures que je fais aux astrologues
Si j'ose me prononcer sur un domaine que je ne connais que très superficiellement, je dirais que l'astrologue ne considère pas toujours ses indications comme de pures possibilités. L'interprétation est trop littérale et trop peu symbolique, aussi trop personnelle. Le "zodiaque" et les planètes ne sont pas des traits personnels, mais plutôt des données impersonnelles et objectives. Aussi [elle aussi] l'interprétation des maisons devrait considérer plusieurs "couches de signification".
Il est évident que l'astrologie peut offrir beaucoup à la psychologie, mais ce que la dernière peut contribuer à sa sœur aînée est moins évident. En tant que je peux juger, il me semble qu'il serait avantageux pour l'astrologie qu'elle se rendrait compte de l'existence de la psychologie, surtout celle de la personnalité et de l'inconscient. Je suis presque sûr qu'on puisse en apprendre quelque chose de sa méthode d'interprétation symbolique. Il s'agit là de l'interprétation des archétypes (les dieux) et de leurs relations mutuelles, commeune aux deux arts. C'est la psychologie de l'inconscient qui s'occupe particulièrement du symbolisme archétypique.






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