09 août 2024

Psychologie des profondeurs : entre simplicité et complexité

Dans un article qu’il rédigea en 1912, C.G. Jung donna à sa discipline le nom de « psychologie analytique », afin de la distinguer clairement de la psychanalyse de Freud. Il exprima en même temps sa préférence pour l’appellation proposée par Bleuler, « psychologie des profondeurs », malgré le fait qu’elle mette l’accent uniquement sur l’inconscient. 

Cette expression « psychologie des profondeurs » était manifestement chère à Jung, et l’on peut facilement comprendre pourquoi. En effet, le domaine des profondeurs occupe une place centrale dans l’ensemble de son œuvre. Dans son livre intitulé « Ma Vie », il exprime : 

« Ma vie est imprégnée, tissée, unifiée par une œuvre, et axée sur un but, celui de pénétrer le secret de la personnalité. Tout s’explique à partir de ce point central, et tous mes ouvrages se rapportent à ce thème ». 


Lorsqu’on découvre l'oeuvre de Jung, on peut être surpris par la complexité apparente de son objectif majeur, qui consiste à « pénétrer le secret de la personnalité », notamment parce que Jung s'exprime fréquemment en ayant recours à la méthode comparative appelée l'amplification ; c'est-à-dire qu'il cherche systématiquement à faire des analogies entre les mythes, les textes philosophiques et religieux anciens  et les processus psychologiques conscients et inconscients qu’il observe chez ses patients. 

Il fait ce que fait en quelque sorte l’inconscient dans ses créations lorsqu’il souhaite se connecter avec le conscient, car l'inconscient possède un aspect analogique et primitif, ainsi qu’une mémoire collective et intemporelle. Finalement, le message central que Jung cherche à transmettre à travers ses écrits est que, lorsque nous ressentons le besoin de plonger en nous-mêmes, soit intentionnellement, soit par le biais de symptômes, de rêves ou de visions, nous cherchons en réalité à atteindre le morceau de nature enfouie ou oubliée en nous-mêmes et que nous réclame instamment la vie de vivre. Jung désigne cela comme étant « les devoirs de la vie ». 

Certes, tous les sujets humains ne viennent pas chercher en analyse la mise au grand jour de l'accomplissement de leur tâche vitale. Mais il est clair que la psychologie des profondeurs invite à faire cela. 

La vie qui doit être vécue, la nature qui parle, expressions que Jung a utilisées pour définir les rêves ; n’est-ce pas, somme toute, un langage on ne peut plus simple et clair ? 

Oui mais voilà, cette clarté de langage a cessé d’être une évidence depuis belle lurette, car, la nature humaine, instinctive et spirituelle, dans nos psychés conscientes, revêt, de nos jours, l’aspect d’objets intérieurs étranges et terrifiants (les angoisses), ou encore de sentiments de danger (les phobies) et par-dessus cela, la manière dont se développent nos sociétés modernes, ultras matérialistes et ultras extériorisées facilite en l’aggravant l’enfouissement de cette nature qui cherche très naturellement, à nous parler via, les images, les rêves, les fantaisies… 

Jung a consacré une grande partie de ses travaux à l’étude de la puissance psychique ou l'archétype de la personnalité qu’il a appelée « le Soi ». Dans l’âme humaine, le Soi n'atteint son plein développement qu'au fil du temps et des expériences vécues. 

Effectivement, ce cheminement vers soi-même, que Jung a baptisé « processus d’individuation», s’amorce par une profonde métamorphose personnelle. Celle-ci se déclenche grâce à la confrontation et à la transformation de nos affects, désirs, et tendances pulsionnelles. 

De plus, afin d’ajouter une couche de complexité, sans le vouloir, Jung a utilisé la symbolique de l’alchimie, cette discipline considérée comme ésotérique, pour établir un parallèle entre le processus évolutif de la psyché humaine et les transformations miraculeuses que les alchimistes croyaient possibles dans la matière.