28 janvier 2014

La libido se transforme


La libido, énergie psychique non spécifiée, non visible directement,  existe dans notre univers mental et physique à l’état d’images dirigée vers un but, une activité qui n’est jamais la même. Un but qui deviendra geste, désir, puis idée. Car derrière l’activité primale que pointe par  l’émotion et l’image la libido se tient l’archétype. L’archétype étant le générateur de l’idée primale. L’agent de l’idée.

Le fonctionnement de l'archétype ressemble en somme à celui de l’instinct qui s’observe par exemple dans le monde animal.  Les instincts s’emploient à orienter les animaux vers des activités de survie : s’attacher, manger, construire, lutter, tuer, parader, s'unir etc.  A la différence des instincts animaux, nos archétypes humains sont livrés avec « un plan »  à découvrir  et  « un dictionnaire historique » à déplier.

Quand par exemple, soudain telle idée, telle situation, telle personne, ou tel  rêve se mettent à faire sens à l’intérieur de vous, hé bien il y a de grande chance que ce soit dû au plan qui vient d’être touché. La psychanalyse lacanienne parlera plus volontiers de structures.


Ne retrouvons-nous pas les mêmes activités automatiques et aveugles lorsque nous lançons nos petites applis modernes avec nos smartphones. Programmes informatiques réglés pour fonctionner tout seuls dans un certain but et pour produire une certaine activité, certes, ici dans le domaine de la vie pratique.

Avec la libido, mais nous pourrions tout aussi bien parler d’inconscient ou d’archétypes, nous retrouvons ses mêmes qualités directionnelles et involontaires. Au départ seulement, car la libido humaine est capable de se transformer, et donc de produire des symboles ; des symboles qui vont conduire l’énergie psychique peu à peu vers une nouvelle forme d’utilisation. 

Chaque nouvelle forme produite rend la personne en capacité dirons- nous, de devenir plus consciente de l’idée.  Qui elle ne change jamais. C’est un peu comme si la forme changeait mais le fond jamais. Et c’est sans doute beaucoup pour cela que ce fond constitué d’images éternelles, dit l’inconscient collectif, renferme non pas que de l’instinctuel (le ça de Freud) mais aussi et non en moins grande quantité, du spirituel.
   
En d’autres termes, la libido ou l’énergie de l’instinct peut évoluer et donc se transformer grâce aux symboles. Jung compare le symbole à une machine transformatrice de l’énergie. Puisqu’il va amener, en effet, l’énergie à prendre une autre forme d’activité. Cela revient, dans la nature, à par exemple transformer la force du vent en une force produisant de la chaleur au moyen d’une éolienne. Le symbole remplit dans notre vie psychique ou mentale le même rôle que l’éolienne. 

Transformer l’énergie veut dire, par conséquent, utiliser l’énergie autrement.

Nous trouvons un très bon exemple de transformation de l’énergie psychique dans les coutumes des sociétés primitives. Un exemple que je détaillerai dans un prochain billet.

23 janvier 2014

Les dangers de l'idéologie

Le psychologue est un fervent défenseur de la loi innée de vie propre à chaque personne. Et se méfie donc des idéologies qui promettent des lendemains qui chantent.

Les grandes réformes sociétales engagées par le gouvernement en font partie- je pense en particulier au droit à l’IVG renforcé. Ce projet laisse supposer qu’il s’agit d’accorder aux femmes plus de liberté et d’égalité. 

Mais c’est aussi oublier que l’avortement s’il devient vraiment un acte médical comme les autres, il risque surtout de multiplier le nombre de passages à l’acte chez les femmes.  Car la décision d’avorter se prendra alors encore plus à la hâte, sans recul, sans conseil ni accompagnement médical ou psychologique. 

Ce nouveau droit risquerait alors d’entraîner des conséquences désastreuses sur toute la vie de nombreuses femmes. 


(posté sur ma nouvelle page Google)


01 janvier 2014

Quel avenir pour les relations amoureuses modernes ?


Mais qu’est-ce qui est entrain de changer dans le domaine de l’expérience amoureuse aujourd’hui ? Pourquoi dans un monde très attaché au progrès, les relations amoureuses conduisent encore à tant de souffrance, de déceptions, de déchirures, d’instabilités, et de malentendus ? Qu’est-ce qui ne progresse pas dans ce domaine ?  
 
Pour les sociologues[1] ce qui ne change pas est que ce sont toujours les femmes qui trinquent le plus. Cela malgré la lutte livrée par les féministes sur le plan sexuel et sacrificiel. Elles souffrent de ce que devient l’amour aujourd’hui : un marché sans aucune régulation. « Les hommes ont plus de choix et sont plus longtemps sur le marché de l’amour. Cela a amené chez eux un effacement de la volonté de s’engager dans une relation durable ». Et lorsque l’offre devient abondante, c’est le zapping ! Les économistes parlent « d’incapacité à former une préférence stable ». En psychanalyse on aurait plutôt tendance à évoquer la présence d’un infantilisme persistant.

Les femmes les plus en peine sont, certes, celles qui cherchent un amour stable. Mais toutes les femmes devraient en fait, se sentir concernées par les métamorphoses de l’amour, car l’amour reste un thème féminin, et comme disait Jung « la femme seule, sait que l’amour seul lui donne la plénitude du développement».

La question que je me pose aujourd’hui est, si l’amour est si fortement influencé par la culture de la consommation, qui est la culture du grand choix sexuel, du jetable, de la satisfaction des besoins élémentaires et utilitaires,  qui n’obligent en rien les hommes et les femmes qui se rencontrent à se marier, ni à s’engager durablement comment vont s’effectuer les métamorphoses que permet leur Eros ?

Eva Ilouz nous dit que la relation amoureuse est le seul domaine où aucune exigence n’est clairement posée, alors que dans tous les autres, il existe des règles d’éthique élémentaires et des arbitres. D’un point de vue psychanalytique, ce vide d’éthiques et de règles mes fait penser au fonctionnement d’un Eros, la vie érotique, seul, sans le Logos, l’esprit. Et je trouve cela de plus en plus inquiétant. Car le tableau de la situation de l’amour que dressent les sociologues se vérifie tous les jours sur le terrain. Les femmes, jeunes et moins jeunes, souffrent souvent en silence ; chantonnent le ’tous les mêmes » de Stromae, ou bien encore cherchent sans trouver parce qu’elles n’ont pas assez chercher longtemps (voir le film «Jamais le premier soir » d’Alexandra Lamy.    

Le domaine de l’intime et de l’éternel, l’amour donc, change de visage, l’amour inconditionnel n’existera bientôt plus sauf avec les enfants. Dés la moindre contrariété ou mésentente, on se sépare, on jette l’éponge. Ce n’est plus l’amour, en tant que valeur et sentiment mais le calcul de plaisirs et de peines qui guident la durée d’une relation.

Si la relation amoureuse ne dure pas, si les moindres effort sont écartés, comment Eros peut-il s’inscrire dans la réalité, et ainsi se transformer ?

Enfin, si le vécu de l’amour ressemble de plus en plus à un marché n’est-ce pas le signe que le vécu de l’amour se masculinise beaucoup ? Les femmes ne se sont-elle pas déjà appropriées massivement les valeurs masculines économiquement et socialement ? En pensée psychanalytique, nous dirions qu’elles ont laissé agir leur partie masculine inconsciente. Les hommes possèdent certes une contrepartie féminine inconsciente, mais elle a encore beaucoup besoin de passer par l’intermédiaire des femmes pour exister. Finalement, la poursuite de la transformation d’Eros ne dépend t-elle pas en grande partie des femmes, ou autrement dit du développement de l’individualité féminine ?



[1] Eva Illouz – Pourquoi l’amour fait mal. L’expérience amoureuse dans la modernité. Seuil, 2012




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