Si je m’attarde longuement sur le concept de libido définit
par Jung, c’est parce que j’estime qu’il est fondamental. « Tout se passe comme si on ne pouvait parler
de la vie psychique sans penser en termes d’énergie » nous dit très
justement Susanne Delord-Kacirek[1]
La libido, grande force génératrice de sens caché, est également
un concept fondamental parce qu’elle anime – rend vivante - et articule la psychologie
analytique. L’énergétique jungienne correspond
à une démarche de connaissance précise, originale et très structurée des
processus psychiques.
De façon générale, l’apport essentiel de Jung dans ce
champ conceptuel, n’est guère mentionné dés qu’on prononce son nom. Perdure à
son sujet seulement l’idée automatique du litige l’ayant opposé à Freud sur la
question du caractère sexuel ou non de la libido. Certes la théorie de la
libido fut décrite par Jung, dans ses débuts, beaucoup en réaction à la
position unilatérale et sexualiste tenue par Freud. Mais voilà, Freud était lui
aussi un énergéticien, acharné et
subtil, des phénomènes psychiques ; et nous savons tous que c’est
sa théorie sexuelle qui fut remarquée et peu à peu appréciée par la médecine
scientifique de son époque.
De fait, l’on comprend aisément combien difficile pour
Jung fut l’épreuve de son éloignement du grand fondateur de l’énergie psychique.
Toutefois, en dépit de l’hostilité ambiante,
il œuvra d’arrache-pied pour tenter de fonder sa propre science toute balbutiante ;
poussée puissante, poussée débordante d’une science que l’on découvre avec délice
dans "Métamorphose de l’âme et ses symboles". On comprend, aussi, qu’il fut fort occupé ensuite et ce jusqu’en 1930 à produire
une théorie acceptable par la communauté scientifique. Pour finir, il fut
vivement critiqué et mal critiqué. Freud l’accusa même de rétrograder la psychanalyse, ce qui est totalement faux bien
entendu. Cette accusation et bien d’autres proviennent d’une méconnaissance
totale des caractéristiques fondamentales de la théorie de la libido.
Ce qui échappe, précisément, aux non connaisseurs de la
théorie jugienne de la libido, c’est qu’elle sert à appréhender les processus
forcément mouvants-vivants de la psyché humaine. Ecoutons à nouveau Susanne
Delord-Kacirek, grande spécialiste de la pensée énergéticienne de Jung : "Nous pouvons nous attendre à une
grande mouvance de la théorie de la libido. Comment en serait-il autrement
puisque l’ambition de la pensée énergéticienne est justement d’appréhender le
mouvant, quoi de plus mouvant que
l’infinie variabilité de la vie psychique".
De plus, en introduisant l’idée selon laquelle la libido est un véritable X (voir ici), Jung a renoncé "volontairement au rêve de puissance qu’alimente la prétention à la
connaissance". De sorte que
l’on ne peut guère prétendre qu’il ait cherché à enfermer sa théorie dans un
dogme, une foi, ou dans une quelconque affirmation métaphysique. Nous trouvons juste l’éloge
d’un X. Jung à créé la science du mouvant applicable au psychisme, la science de
ce qui advient, et donc de se qui se transforme par et dans l’inconscient. Tâche
ardue, à n’en pas douter, s’agissant de mettre en mot et dans un style clair et
concis l’ampleur de cette mouvance psychique ; l’exercice se révèle être une véritable
réussite chez Jung.
SDK nous dit encore, « la théorie de la libido est d’abord une théorie des transformations psychiques,
qui vise en même temps leur mise en œuvre ». C’est vers l'explication de cette
transformation de la libido que je souhaite conduire peu à peu mes lecteurs. Pour
ce faire, je continuerais à m’appuyer sur l’ouvrage grandiose de Jung, "Métamorphose
de l’âme et ses symboles". Enfin, comme d’habitude mon travail se fonde sur ma compréhension
personnelle et globale des textes de Jung.
[1] Le concept de libido selon C.G.Jung - Susanne DELORD KACIREK in Cahiers jungiens de psychanalyse, n° 28
(1980)
Illustration : aquarelle "Mouvance" de Françoise Dubourg (www.francoise-dubourg.com)
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